AFRICAN UNION |
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UNION AFRICAINE |
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UNIÃO AFRICANA | |
AFRICAN COURT ON HUMAN AND PEOPLES’ RIGHTS COUR AFRICAINE DES DROITS DE L’HOMME ET DES PEUPLES | ||
AFFAIRE
LADISLAUS CHALULA
c.
RÉPUBLIQUE-UNIE DE TANZANIE
REQUÊTE No 003/2018
ORDONNANCE PORTANT MESURES PROVISOIRES
17 MAI 2019
La Cour composée de : Sylvain ORÉ, Président ; Ben KIOKO, Vice-président ; Rafaậ BEN ACHOUR, Ângelo V. MATUSSE, M.-Thérèse MUKAMULISA, Suzanne MENGUE, Tujilane R. CHIZUMILA, Chafika BENSAOULA, Blaise TCHIKAYA, Stella I. ANUKAM- Juges ; et Robert ENO, Greffier.
En l’affaire
Ladislaus CHALULA
Représenté par
Donald Omendi Deya, Counsel for Applicant, Pan African Lawyers Union
Contre
RÉPUBLIQUE-UNIE DE TANZANIE
Représentée par :
Dr. Clement Julius MASHAMBA, Solicitor General, Cabinet de l’Attorney General
Après en avoir délibéré,
Rend la présente Ordonnance :
OBJET DE LA REQUÊTE
Le 02 Mars 2018, le Cour a reçu une requête introductive d’instance présentée par Ladislaus CHALULA (ci-après dénommé « le Requérant », contre la République-Unie de Tanzanie (ci-après dénommée « le Défendeur », pour violation alléguée de ses droits de l’homme.
Le Requérant, actuellement détenu à Uyui Central Prison de Tabura, a été reconnu coupable de meurtre puis condamné à la peine capitale par pendaison le 17 mars 1995 par la High Court of Tanzania siégeant à Tabora. La peine a été confirmée le 10 juin 1999 par la Court of Appeal, qui est la plus haute juridiction de Tanzanie.
Le Requérant allègue notamment, que le procès devant la High Court été entaché d’irrégularité, que la High Court et la Court of Appeal ont commis des erreurs sur les preuves de l’accusation et l’identification visuelle.
Dans un mémoire daté du 06 mai 2019, il est demandé à la Cour d’ordonner des mesures provisoires.
PROCÉDURE DEVANT LA COUR
La Requête a été reçue au Greffe de la Cour le 02 Mars 2018.
Conformément à l’article 35 du Règlement de la Cour, la Requête a été signifié à l’Etat Défendeur le 23 juillet 2018.
COMPÉTENCE
Lorsqu’elle est saisie d’une requête, la Cour doit procéder à un examen préliminaire de sa compétence, en application des articles 3 et 5 du Protocole à la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples portant création de la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples (ci-après dénommé le Protocole).
Toutefois, avant d’ordonner des mesures provisoires, la Cour n’a pas à se convaincre qu’elle a compétence sur le fond de l’affaire, mais simplement s’assurer qu’elle compétence prima facie.1
L’article 3(1) du Protocole dispose que « la Cour a compétence pour connaître de toutes les affaires et tous les différends dont elle est saisie concernant l’interprétation et l’application de la Charte, du présent Protocole et tout autre instrument pertinent relatif aux droits de l’homme et ratifié par les Etats concernés ».
L’Etat défendeur est devenu partie à la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples (ci-après dénommée ‘la Charte ») le 21 octobre 1986, au Protocole le 7 février 2006. Il a également fait la déclaration acceptant la compétence de la Cour pour recevoir les requêtes émanant d’individus et d’organisations non gouvernementales conformément aux articles 34 (6) et 5(3) du Protocole lus conjointement le 29 Mars 2010.
Les violations alléguées qui font l’objet de la Requête portent sur les droits protégés par les articles 3(2), 4 et 7(1) (c) de la Charte. La Cour a donc la compétence rationae materiae pour connaître de la requête en l’espèce.
A la lumière de ce qui précède, la Cour s’est assurée qu’elle a compétence prima facie pour examiner la requête.
SUR LES MESURES PROVISOIRES
Comme indiqué au paragraphe 4 ci-dessus, le Requérant demande à la Cour d’ordonner des mesures provisoires.
En vertu de l’article 27(2) du Protocole et de l’article 51(1) de son Règlement Intérieur, « dans les cas d’extrême gravité ou d’urgence et lorsqu’il s’avère nécessaire d’éviter des dommages irréparables à des personnes la Cour ordonne les mesures provisoires qu’elle juge pertinentes », ou les mesures « qu’elle estime devoir être adoptées dans l’intérêt des parties ou de la justice ».
Il appartient à la Cour de décider dans chaque situation si, à la lumière des circonstances particulières de l’affaire, elle doit exercer la compétence qui lui est conférée par les dispositions ci-dessus.
En l’espèce, il ressort du dossier que le Requérant est condamné à la peine capitale.
Compte tenu des circonstances de l’espèce qui révèlent un risque d’application de la peine capitale susceptible de porter atteinte à la jouissance des droits prévus aux articles 3(2), 7(1) (C) de la Charte, la Cour décide d’exercer ses pouvoirs en vertu de l’article 27(2) du Protocole.
En conséquence, la Cour conclut que les circonstances exigent une Ordonnance portant mesures provisoires, en application de l’article 27(2) du Protocole et de l’article 51 de son Règlement Intérieur, pour préserver le statu quo, en attendant la décision sur la requête principale.
Pour lever toute ambigüité, la présente Ordonnance est de nature provisoire et ne préjuge en rien des décisions de la Cour sur sa compétence, sur la recevabilité de la requête et sir me fond de l’affaire.
DISPOSITIF
Par ces motifs,
La Cour,
à’ l’unanimité, ordonne au Défendeur :
De surseoir à l’application de la peine capitale à l’encontre du Requérant, sous réserve de la décision relative à la requête principale ; et
De faire rapport à la Cour dans les soixante (60) jours à compter de la date de réception de la présente Ordonnance, sur les mesures prises pour la mettre en œuvre.
Fait à Arusha ce Dix-septième Jour du mois de mai deux mille dix-neuf, en anglais et en français, la version anglaise faisant foi.
Ont signé
Sylvain ORÉ, Président
Robert ENO, Greffier.
1 Voir requête n° 002 /2013, Commission Africaine des droits de l’homme et des peuples c. Libye (Ordonnance portant mesures provisoires datée du 15 Mars 2013) et Requête n° 006/2012, Commission Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples c. Kenya (Ordonnance portant mesures provisoires datée du 15 Mars 2013) ; Requête n° 004/2011, Commission Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples C. Lybie (Ordonnance portant mesures provisoires datée du 25 Mars 2011).

