Mussa c République-Unie de Tanzanie (Requête N° 031/2016) [2023] AfCHPR 11 (13 juin 2023)

Mussa c République-Unie de Tanzanie (Requête N° 031/2016) [2023] AfCHPR 11 (13 juin 2023)

 

 

 

AFRICAN UNION

UNION AFRICAINE

 

 

 

 

UNIÃO AFRICANA

 

 

 

 

 

AFRICAN COURT ON HUMAN AND PEOPLES’ RIGHTS

COUR AFRICAINE DES DROITS DE L’HOMME ET DES PEUPLES

 

 

 

 

AFFAIRE

 

UMALO MUSSA

 

 

C.

 

 

RÉPUBLIQUE-UNIE DE TANZANIE

 

 

REQUÊTE N° 031/2016

 

 

ARRÊT

 

 

 

13 JUIN 2023

 

SOMMAIRE

 

 

La Cour, composée de : Blaise TCHIKAYA, Vice-président ; Ben KIOKO, Rafaâ BEN ACHOUR, Suzanne MENGUE, Tujilane R. CHIZUMILA, Chafika BENSAOULA, Stella I. ANUKAM, Dumisa B. NTSEBEZA, Modibo SACKO et Dennis D. ADJEI – Juges ; et de Robert ENO, Greffier.

 

Conformément à l’article 22 du Protocole relatif à la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples portant création d’une Cour africaine des droits de l’homme et des peuples (ci-après désigné le « Protocole ») et à la règle 9(2) du Règlement intérieur de la Cour (ci-après désigné « le Règlement »), la Juge Imani D. ABOUD, Présidente de la Cour et de nationalité tanzanienne, s’est récusée.

 

En l’affaire :

 

Umalo MUSSA

 

assurant lui-même sa défense

 

contre

 

RÉPUBLIQUE-UNIE DE TANZANIE

 

représentée par :

 

Dr. Boniphace Nalija Luhende, Solicitor General, Bureau du Solicitor General ;

Mme Sarah Duncan MWAIPOPO, Solicitor General adjointe, Bureau du Solicitor General ;

Mme Nkasori SARAKIKYA, Directrice adjointe, Droits de l’homme, Principal State Attorney, Cabinet de l’Attorney General ;

M. Richard KILANGA, Senior State Attorney, Cabinet de l’Attorney General ;

M. Baraka LUVANDA, Ambassadeur, Directeur de l’Unité juridique, ministère des Affaires étrangères et de la Coopération avec l’Afrique de l’Est ;

M. Elisha SUKA, Fonctionnaire chargé des services extérieurs, ministère des Affaires étrangères et de la Coopération avec l’Afrique de l’Est ; et

Mme Blandina KASAGAMA, Juriste, ministère des Affaires étrangères et de la Coopération avec l’Afrique de l’Est.

 

après en avoir délibéré,

 

rend le présent Arrêt :

 

 

LES PARTIES

 

Le sieur Umalo Mussa (ci-après dénommé « le Requérant ») est un ressortissant tanzanien qui, au moment du dépôt de la Requête, était incarcéré à la prison centrale de Butimba, dans la région de Mwanza, dans l’attente de l’exécution de la peine capitale prononcée à son encontre, après avoir été jugé et condamné pour meurtre. Le Requérant allègue la violation de ses droits à un procès équitable dans le cadre de la procédure devant les juridictions nationales.

 

La Requête est dirigée contre la République-Unie de Tanzanie (ci-après dénommée « l’État défendeur »), qui est devenue partie à la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples (ci-après désignée la « Charte ») le 21 octobre 1986 et au Protocole le 10 février 2006. Elle a également déposé, le 29 mars 2010, la Déclaration prévue à l’article 34(6) du Protocole (ci-après désignée « la Déclaration »), par laquelle elle accepte la compétence de la Cour pour recevoir des requêtes émanant d’individus et d’organisations non gouvernementales. Le 21 novembre 2019, l’État défendeur a déposé auprès du Président de la Commission de l’Union africaine un instrument de retrait de sa Déclaration. La Cour a décidé que le retrait de la Déclaration n’avait aucune incidence, ni sur les affaires pendantes, ni sur les nouvelles affaires introduites devant elle avant sa prise d’effet un (1) an après le dépôt de l’instrument y relatif, à savoir le 22 novembre 2020.1

OBJET DE LA REQUÊTE

 

Faits de la cause

 

Il ressort du dossier que, le 18 mars 1995, dans le village de Karenge situé dans le district de Karagwe, région de Kagera, le Requérant et deux (2) autres co-accusés, depuis décédées,2 ont assassiné Rwabuhaya Kilai et son épouse, Miburo Rwabuhaya.

 

Le 29 juin 2005, la Haute Cour siégeant à Bukoba a déclaré le Requérant coupable de meurtre sur deux personnes et l’a condamné à la peine capitale par pendaison. Le Requérant a interjeté appel de sa condamnation et de sa peine devant la Cour d’appel siégeant à Mwanza, qui, le 21 mai 2009, a rejeté son recours dans son intégralité.

 

Le Requérant affirme avoir, par la suite, le 11 mars 2014, déposé un avis de requête en révision de la décision de la Cour d’appel qui était pendante au moment du dépôt de la Requête devant la Cour de céans le 8 juin 2016.

 

Violations alléguées

 

Le Requérant allègue la violation de son droit :

 

à ce que sa cause soit entendue, dans la mesure où la Haute Cour l’a condamné et la Cour d’Appel a confirmé ladite condamnation prononcée à son encontre sur la base d’une déclaration auto-incriminante obtenue sous la contrainte, par rapport à laquelle il s’est rétracté.

prévu à l’article 7(1)(a) et (d) de la Charte et à l’article 136(a) et 107(a) 2(b) de la Constitution de Tanzanie de 1977, en raison du retard accusé dans l’examen de sa requête en révision.

à la défense, prévu à l’article 7(1)(c) de la Charte en ne lui octroyant pas un défenseur de son choix.

RÉSUMÉ DE LA PROCÉDURE DEVANT LA COUR DE CÉANS

 

La Requête introductive d’instance, assortie d’une demande de mesures provisoires, a été reçue au Greffe le 8 juin 2016 et communiquée à l’État défendeur le 26 juillet 2016. Le 8 septembre 2016, la Requête a été communiquée au Conseil exécutif de l’Union africaine et aux États parties au Protocole par l’entremise du Président de la Commission de l’Union africaine.

 

Les Parties ont soumis leurs observations sur le fond dans les délais fixés par la Cour. Le Requérant a soumis ses conclusions sur les réparations, auxquelles l’État défendeur n’a pas répondu, malgré les nombreuses prorogations de délais qui lui ont été accordées par la Cour à cet effet. Les débats ont été clôturés le 14 novembre 2019 et les Parties en ont dûment reçu notification.

 

Les 7 octobre et 16 novembre 2022 et le 25 janvier 2023, le Requérant a été tenu de déposer des documents pertinents et spécifiques, dans un délai de trente (30) jours suivant réception desdites notifications.3 Il s’agit du recours en révision dans la requête pénale n° 2 de 2014 assortie de la preuve qu’il a été reçu au Greffe du tribunal concerné et signifié à l’État défendeur et de la décision de la Cour d’appel dans la requête pénale n° 8 de 2013 autorisant le dépôt de la requête en révision hors délai. Le Requérant n’y a pas donné suite.

 

 

DEMANDES DES PARTIES

 

Le Requérant demande à la Cour de :

 

Dire qu’elle est compétente pour connaitre la Requête et de dire que celle-ci remplit les conditions de recevabilité ;

Ordonner des mesures provisoires conformément à l’article 27(2) du Protocole et l’article 51(1) du Règlement,4 compte tenu de la gravité de sa situation, étant un détenu dans le couloir de la mort.

Dire que l’État défendeur a violé ses droits protégés par les articles 7(1)(a), (c) et (d) de la Charte.

Ordonner à l’État défendeur de lui verser un montant calculé sur la base du « quantum national des revenus annuels d’un citoyen » à titre de réparation pour la période de son incarcération ;

Ordonner sa remise en liberté en guise de réparation du préjudice subi.

 

En ce qui concerne la compétence et la recevabilité, l’État défendeur demande à la Cour de :

 

Dire et juger que la Cour n’est pas compétente pour connaître de la présente Requête ;

Dire et juger que la Requête ne remplit pas les conditions de recevabilité prévues à l’article 40(5) et (6) du Règlement intérieur de la Cour5 ni ne satisfait aux conditions énoncées aux articles 56 et 6(2) du Protocole ;

Déclarer la Requête irrecevable ;

Rejeter la Requête conformément à la règle 38 du Règlement de la Cour.

 

S’agissant du fond, l’État défendeur demande à la Cour de :

 

Dire et juger que le Requérant a été condamné … sur la base de la déclaration extrajudiciaire faite volontairement devant un juge de paix ;

Dire et juger que le Requérant n’a pas été torturé ni contraint par la police à faire de déclaration ;

Dire et juger qu’il n’a pas violé l’article 7(1)(a) et (d) de la Charte ;

Dire et juger qu’il n’a pas violé les articles 13(6) et 107A(2)(b) de la Constitution de la République-Unie de Tanzanie datée de 1977 ;

Rejeter la Requête comme étant non fondée ;

Rejeter les demandes formulées par le Requérant ;

Mettre les frais de procédures de la présente Requête à la charge du Requérant.

 

 

SUR LA COMPÉTENCE

 

La Cour observe que l’article 3 du Protocole dispose :

 

La Cour a compétence pour connaître de toutes les affaires et de tous les différends dont elle est saisie concernant l’interprétation et l’application de la Charte, du […] Protocole, et de tout autre instrument pertinent relatif aux droits de l’homme et ratifié par les États concernés.

En cas de contestation sur le point de savoir si la Cour est compétente, la Cour décide.

 

Aux termes de la règle 49(1) du Règlement, « la Cour procède à un examen préliminaire de sa compétence … conformément à la Charte, au Protocole et au […] Règlement ».

 

Sur le fondement des dispositions susmentionnées, la Cour doit, dans chaque requête, procéder à un examen de sa compétence et statuer sur les exceptions d’incompétence qui s’y rapportent, le cas échéant.

 

La Cour note que l’État défendeur soulève une exception d’incompétence matérielle en l’espèce. La Cour statuera sur cette exception (A) avant d’examiner, si nécessaire, les autres aspects de sa compétence (B).

 

Sur l’exception d’incompétence matérielle

 

Citant l’affaire Ernest Francis Mtingwi c. Malawi, l’État défendeur soutient que la Cour n’a pas compétence pour examiner, en appel, les questions qui ont été tranchées de manière définitive par la Cour d’appel de Tanzanie, en l’occurrence l’admission d’une déclaration extrajudiciaire comme élément de preuve. En outre, il fait valoir que la Cour n’est pas compétente pour annuler la condamnation et ordonner la remise en liberté du Requérant. L’État défendeur soutient également que la Requête ne soulève aucune question relative à l’interprétation de la Charte, du Protocole ou des instruments pertinents relatifs aux droits de l’homme ratifiés par la Tanzanie, mais qu’elle soulève plutôt des problèmes d’ordre juridique liés aux éléments de preuve examinés par les juridictions internes.

 

Le Requérant conclut au rejet de l’exception en faisant valoir que, bien que la Cour ne soit pas une juridiction d’appel, elle est compétente pour examiner la Requête dans la mesure où il y allègue la violation de droits protégés par la Charte. Citant l’affaire Alex Thomas c. Tanzanie, le Requérant soutient que la Cour est compétente pour apprécier si l’examen des allégations d’anomalies judiciaires ou de preuves par les tribunaux nationaux a été conforme aux normes de la Charte.

 

***

 

La Cour rappelle qu’en vertu de l’article 3(1) du Protocole, elle est compétente pour examiner toutes les affaires dont elle est saisie, pour autant qu’elles portent sur des allégations de violation de droits protégés par la Charte ou par tout autre instrument relatif aux droits de l’homme ratifié par l’État défendeur.6

 

La Cour note que l’État défendeur soulève une exception d’incompétence matérielle tirée de trois (3) moyens , à savoir : i) la Cour s’investit d’une compétence d’appel sur des questions tranchées par ses tribunaux nationaux ; ii) les pouvoirs d’annulation, par la Cour, de la peine de mort légalement prononcée à l’encontre du Requérant ; et iii) la Requête soulève des questions d’ordre juridique couvertes par ses lois internes et non par la Charte ou les instruments internationaux ratifiés relatifs aux droits de l’homme, et qui, par ailleurs, ont déjà été tranchées par ses tribunaux nationaux. La Cour va examiner ces moyens.

 

S’agissant du premier moyen, la Cour rappelle sa jurisprudence selon laquelle elle n’exerce pas de compétence d’appel à l’égard des demandes déjà examinées par les juridictions nationales.7 Toutefois, elle conserve le pouvoir d’apprécier la pertinence des procédures internes par rapport aux normes énoncées dans les instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme ratifiés par l’État concerné.8

 

La Cour ne siègera donc pas en tant que juridiction d’appel ni ne réexaminera les éléments de preuve produits devant la Cour d’appel de Tanzanie dans son appréciation des procédures internes qui ont abouti à la condamnation et à la peine prononcée à l’encontre du Requérant. La Cour rejette donc le premier moyen de l’exception soulevée par l’État défendeur.

 

En ce qui concerne le deuxième moyen, la Cour affirme que, conformément à l’article 27(1) du Protocole, « si elle constate qu’il y a eu violation des droits de l’homme ou des peuples », elle « ordonne toutes les mesures appropriées pour remédier à la violation, y compris le paiement d’une juste compensation ou l’octroi d’une réparation ». Lorsqu’elle l’estime nécessaire, la Cour peut ordonner des réparations en rapport avec les peines prononcées à l’encontre d’une victime de violation des droits de l’homme ou des peuples. La Cour rejette donc ce moyen.

 

S’agissant du troisième moyen, la Cour rappelle les dispositions de l’article 7 du Protocole, en vertu desquelles elle interprète et applique les dispositions de la Charte et des autres instruments relatifs aux droits de l’homme ratifiés par l’État défendeur. La Cour se prononcera donc sur les questions soulevées dans la Requête, que le Requérant ait ou non cité les dispositions idoines de la Charte et des autres instruments relatifs aux droits de l’homme ratifiés par l’État défendeur.9 La Cour observe que, en l’espèce, le Requérant allègue que l’État défendeur a violé son droit à un procès équitable, protégé par l’article 7 de la Charte. La Cour rejette, en conséquence, le troisième moyen relatif à l’exception d’incompétence matérielle.

 

À la lumière de ce qui précède, la Cour rejette l’exception soulevée par l’État défendeur et déclare qu’elle a la compétence matérielle pour connaître de la présente Requête.

 

Sur les autres aspects de la compétence

 

La Cour note que l’État défendeur ne conteste pas sa compétence personnelle, temporelle et territoriale. Néanmoins, conformément à la règle 49(1) du Règlement,10 elle doit s’assurer que tous les aspects de sa compétence sont remplis avant de poursuivre l’examen de la Requête.

 

S’agissant de sa compétence personnelle, la Cour rappelle, comme indiqué au paragraphe 2 du présent Arrêt, que le 21 novembre 2019, l’État défendeur a déposé l’instrument de retrait de la Déclaration. La Cour a décidé que le retrait de la Déclaration n’avait aucun effet rétroactif. Par conséquent, il n’a aucune incidence, ni sur les affaires pendantes devant la Cour avant le dépôt de l’instrument de retrait de la Déclaration, ni sur les nouvelles affaires introduites avant sa prise d’effet, un (1) an après le dépôt de l’instrument y relatif, soit le 22 novembre 2020. Par conséquent, la Cour estime qu’elle a la compétence personnelle pour connaître de la présente Requête, celle-ci ayant été déposée avant le retrait de la Déclaration.

 

S’agissant de sa compétence temporelle, la Cour relève que les dates pertinentes, en ce qui concerne l’État défendeur, sont celles de l’entrée en vigueur de la Charte et du Protocole.

 

En l’espèce, la Cour relève que les violations alléguées par le Requérant sont fondées sur les arrêts de la Haute Cour et de la Cour d’appel rendus respectivement le 29 juin 2005 et le 21 mai 2009, soit après la ratification de la Charte et du Protocole par l’État défendeur. En outre, les violations alléguées ont un caractère continu, le Requérant restant condamné et en attente de l’exécution de la peine capitale prononcée à son encontre par la Haute Cour de Bukoba, sur la base de ce qu’il considère comme une procédure inéquitable.11

 

La Cour estime également qu’elle a la compétence territoriale en l’espèce dans la mesure où les violations alléguées se sont produites sur le territoire de l’État défendeur.

 

Compte tenu de ce qui précède, la Cour conclut qu’elle est compétente pour connaître de la présente Requête.

 

 

SUR LA RECEVABILITÉ

 

Aux termes de l’article 6(2) du Protocole, « la Cour statue sur la recevabilité des requêtes en tenant compte des dispositions énoncées à l’article 56 de la Charte ».

 

En vertu des règles 49(1) et 50 du Règlement, « [l]a Cour procède à un examen de la recevabilité des requêtes introduites devant elle conformément aux articles 56 de la Charte et 6, alinéa 2 du Protocole, et au […] Règlement ».

La règle 50(2) du Règlement, qui reprend en substance les dispositions de l’article 56 de la Charte, est libellée comme suit :

 

Les requêtes déposées devant la Cour doivent remplir toutes les conditions ci-après :

Indiquer l’identité de leur auteur même si celui-ci demande à la Cour de garder l’anonymat ;

Être compatibles avec l’Acte constitutif de l’Union africaine et la Charte ;

Ne pas être rédigées dans des termes outrageants ou insultants à l’égard de l’État concerné et ses institutions ou de l’Union africaine ;

Ne pas se limiter à rassembler exclusivement des nouvelles diffusées par les moyens de communication de masse ;

Être postérieures à l’épuisement des recours internes s’ils existent, à moins qu’il ne soit manifeste à la Cour que la procédure de ces recours se prolonge de façon anormale ;

Être introduites dans un délai raisonnable courant depuis l’épuisement des recours internes ou depuis la date retenue par la Cour comme faisant commencer à courir le délai de sa saisine ;

Ne pas concerner des affaires qui ont été réglées par les États concernés, conformément aux principes de la Charte des Nations Unies, de l’Acte constitutif de l’Union africaine ou des dispositions de la Charte.

 

La Cour note que l’État défendeur soulève deux (2) exceptions d’irrecevabilité de la Requête, l’une tirée du non-épuisement des recours internes et l’autre du dépôt de la Requête dans un délai non raisonnable.

 

Sur l’exception tirée du non-épuisement des recours internes

 

L’État défendeur soutient qu’en violation de l’article 40(5) du Règlement de la Cour,12 la Requête a été introduite de façon prématurée. Il affirme que le Requérant n’a pas exercé le recours en inconstitutionnalité devant la Haute Cour conformément à l’article 13(6) de la Constitution de Tanzanie (1977), ni demandé la révision de la décision de la Cour d’appel pour qu’il soit remédié à la violation alléguée de son droit à ce que sa cause soit entendue.

 

Dans la Réplique, le Requérant soutient qu’il a épuisé les recours internes avant de saisir la Cour. Il fait valoir qu’un recours en inconstitutionnalité aurait peu de chance de prospérer dans la mesure où un juge chargé de statuer sur les requêtes en inconstitutionnalité ne peut, à lui seul, annuler la décision de la Cour d’appel, qui a été rendue par un collège de trois juges. En outre, le Requérant réfute l’affirmation selon laquelle il n’a pas exercé de recours en révision, étant donné qu’il a déposé un avis de requête en révision de la décision de la Cour d’appel, qui a été reçu par le « Greffe de la Cour d’appel de Bukoba le 11 mars 2014 ».

 

***

 

La Cour relève qu’aux termes de l’article 56(5) de la Charte, dont les dispositions sont reprises par la règle 50(2)(e) du Règlement, toute requête dont elle est saisie doit satisfaire à l’exigence de l’épuisement des recours internes. Cette exigence vise à donner aux États la possibilité de traiter les violations des droits de l’homme relevant de leur juridiction avant qu’un organe international des droits de l’homme ne soit saisi pour déterminer la responsabilité de l’État à cet égard.13

 

La Cour de céans a également conclu dans un certain nombre d’affaires impliquant l’État défendeur que les recours en inconstitutionnalité devant la Haute Cour et le recours en révision, tel qu’ils s’appliquent dans le système judiciaire de l’État défendeur, sont des recours extraordinaires qu’un Requérant n’est pas tenu d’épuiser avant de la saisir.14

 

La Cour relève que la Cour d’appel de Tanzanie, l’organe judiciaire suprême de l’État défendeur, a, par son Arrêt du 21 mai 2009 sur l’appel du Requérant, confirmé la condamnation de celui-ci à la suite de procédures qui, selon le Requérant, ont violé ses droits. La Cour estime donc que le Requérant a épuisé les recours internes avant de la saisir.

 

À la lumière de ce qui précède, la Cour rejette l’exception tirée du non-épuisement des recours internes, soulevée par l’État défendeur.

 

Sur l’exception tirée du dépôt de la Requête dans un délai non raisonnable

 

L’État défendeur soutient que la Requête n’a pas été déposée dans un délai raisonnable conformément à l’article 40(6) du Règlement de la Cour.15 À cet égard, il invoque quatre (4) moyens. Premièrement, l’État défendeur affirme que la requête en révision « dont copie a été jointe par le Requérant, n’a pas été déposée au greffe de la Cour d’appel, aucune preuve de signification n’ayant été produite par le Requérant ; la requête n’a pas été visée par le greffier, elle ne comporte aucun cachet prouvant qu’elle a été reçue par l’État défendeur, ni de numéro de référence attribué par la Cour ». Deuxièmement, « l’avis de requête en révision a été déposé après cinq (5) ans, au mépris de la règle 66 du Règlement de la Cour d’appel, selon laquelle l’avis de requête en révision doit être déposé dans les soixante (60) jours à compter de la date de l’arrêt ». Troisièmement, la Requête devant la Cour africaine a été déposée après sept (7) ans, ce qui n’est pas conforme à la décision de la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples (la Commission) dans l’affaire Majuru c. Zimbabwe, qui indique que le dépôt d’une requête après une période de six (6) mois est non raisonnable. Quatrièmement, en déposant la présente Requête, le Requérant a prouvé que son incarcération n’a pas entravé son accès à la Cour.

 

En réplique, le Requérant fait valoir que le Règlement de la Cour ne comporte aucune disposition sur le délai de dépôt d’une requête, mais que le délai raisonnable est déterminé au cas par cas. Le Requérant soutient en outre que sa Requête a été déposée dans un délai raisonnable, dans la mesure où son recours en révision n’a pas encore été définitivement tranché. Il soutient également que son incarcération dans le couloir de la mort a limité sa capacité à assurer un suivi de l’instruction dudit recours, ainsi qu’à accéder à la Cour d’appel et à la Cour de céans.

 

***

 

La Cour note que la question à trancher est celle de savoir si le délai auquel le Requérant l’a saisie est raisonnable au sens de l’article 56(6) de la Charte, lu conjointement avec la règle 50(2)(f) du Règlement.

 

Conformément à l’article 56(6) de la Charte dont les dispositions sont reprises à la règle 50(2)(f) du Règlement, une requête n’est recevable que si elle est « introduite dans un délai raisonnable courant depuis l’épuisement des recours internes ou depuis la date retenue par la Cour comme faisant commencer à courir le délai de sa saisine ». Ces dispositions ne fixent pas de délai dans lequel la Cour doit être saisie.

 

En ce qui concerne le premier moyen de l’exception tiré de ce que la requête en révision n’a jamais été déposée, ni signifiée à l’État défendeur, la Cour note une contradiction dans les arguments de l’État défendeur puisque, d’une part, il conteste le dépôt et la signification de la requête en révision et, d’autre part, il reconnaît que la demande a été déposée, bien que hors délai.

 

Les 7 octobre et 12 novembre 2022 et le 25 janvier 2023, la Cour a demandé au Requérant de déposer des documents indiquant que la Cour d’Appel lui a accordé l’autorisation de déposer sa Requête en révision hors délai et que ladite requête a été déposée et signifiée à l’État défendeur. Le Requérant n’y a pas donné suite. Compte tenu de ce qui précède, la Cour estime que l’allégation du Requérant selon laquelle la requête en révision était pendante au moment de la saisine de la Cour de céans, n’a pas été prouvée.

 

La Cour note, en ce qui concerne le deuxième moyen de l’exception, qu’en tout état de cause, le respect des délais relatifs aux procédures internes n’est pas pertinent pour évaluer le caractère raisonnable du délai de dépôt des requêtes devant elle. La Cour estime donc que l’argument de l’État défendeur selon lequel le Requérant aurait dû déposer l’avis de requête en révision de l’arrêt de la Cour d’appel dans un délai de soixante (60) jours est sans incidence sur l’évaluation du caractère raisonnable du délai de dépôt de la Requête devant la Cour de céans.

 

En ce qui concerne le troisième moyen, la Cour relève que, conformément à sa jurisprudence constante, l’approche au cas par cas appliquée dans la décision de la Commission dans l’affaire Majuru c. Zimbabwe16 est celle qui est applicable, et non la norme des six mois.17 Par conséquent, l’argument de l’État défendeur selon lequel le dépôt d’une requête devant la Cour de céans plus de six (6) mois après l’épuisement des recours internes, devrait être considéré comme l’ayant été de manière non raisonnable, ne saurait être retenu.

 

En l’espèce, la Cour relève que le Requérant a épuisé les recours internes le 21 mai 2009, lorsque la Cour d’appel siégeant à Mwanza a rendu son arrêt rejetant son recours. Cette date devrait être le point de départ du décompte pour apprécier le caractère raisonnable du délai de saisine de la Cour. Cependant, ce n’est qu’après le 29 mars 2010, date du dépôt de la Déclaration, que le Requérant a pu introduire la Requête. Normalement, la période à prendre en compte pour l’appréciation du délai de dépôt de la Requête devrait être les six (6) ans, deux (2) mois et dix-neuf (19) jours, correspondant à la période qui s’est écoulée entre le 29 mars 2010, date du dépôt par l’État défendeur de la Déclaration, et celle du dépôt de la Requête le 8 juin 2016.

 

La Cour relève toutefois que la période allant de 2007 à 2013 correspond aux premières années d’exercice de la Cour. Comme la Cour l’a relevé dans ses arrêts antérieurs, pendant la période indiquée, l’on ne peut présumer que le grand public, à fortiori les personnes dans la situation du Requérant en l’espèce, aient eu une connaissance suffisante de l’existence de la Cour pour déposer leurs requêtes peu après l’épuisement des recours internes.18 Par conséquent, la période à prendre en compte dans l’appréciation du caractère raisonnable du délai de dépôt de la Requête, est celle comprise entre 2013, date à laquelle le public aurait dû avoir connaissance de l’existence de la Cour, et 2016, année du dépôt de la Requête, soit une période de trois (3) ans.

 

La Cour rappelle sa jurisprudence selon laquelle : « … le caractère raisonnable du délai de sa saisine dépend des circonstances particulières de chaque affaire et devrait être apprécié au cas par cas ».19 Dans cette optique, la Cour a pris en considération des circonstances telles que le fait d’être incarcéré, d’être détenu dans le couloir de la mort, avec pour conséquence la restriction des mouvements et du flux d’information,20 le fait d’être profane en droit et de ne pas bénéficier d’une assistance judiciaire,21 et de ne pas avoir connaissance de l’existence de la Cour.22 Néanmoins, ces circonstances doivent être prouvées.

 

Dans la présente Requête, la Cour note que le Requérant n’est pas seulement incarcéré, mais qu’il est dans le couloir de la mort depuis sa condamnation en 2005, avec pour conséquence une restriction de ses mouvements et du flux d’informations, ce qui, conformément aux conclusions de la Cour, dans des affaires similaires antérieures, pouvait entraîner des retards dans le dépôt des requêtes.23 La Cour estime que cette situation fait échec au quatrième moyen de l’exception de l’État défendeur, selon lequel le Requérant ne peut prétendre avoir été empêché d’accéder à la Cour, puisque la question qui se pose est celle du respect des délais. La Cour observe enfin que le Requérant assure lui-même sa défense devant la Cour de céans.

 

Au regard de ce qui précède, la Cour estime que le délai de trois (3) ans observé par le Requérant avant d’introduire sa Requête est raisonnable au sens de l’article 56(6) de la Charte et de la règle 50(2)(f) du Règlement.

 

En conséquence, la Cour rejette l’exception d’irrecevabilité soulevée par l’État défendeur, tirée du dépôt de la présente Requête dans un délai non raisonnable.

 

Sur les autres conditions de recevabilité

 

La Cour relève qu’aucune contestation n’a été soulevée concernant le respect des conditions énoncées à la règle 50(2), (a), (b), (c), (d), (e) et (g) du Règlement. Toutefois, elle doit s’assurer que la Requête remplit ces critères.

 

Il ressort du dossier que le Requérant a été clairement identifié par son nom, conformément à la règle 50(2)(a) du Règlement.

 

La Cour relève également que les demandes formulées par le Requérant visent à protéger ses droits garantis par la Charte. Elle note, en outre, que l’un des objectifs de l’Acte constitutif de l’Union africaine, tel qu’énoncé en son article 3(h), est la promotion et la protection des droits de l’homme et des peuples. La Cour en conclut que la Requête est compatible avec l’Acte constitutif de l’Union africaine et la Charte et qu’elle satisfait aux exigences de l’article 50(2)(b) du Règlement.

 

La Cour observe, par ailleurs, que la Requête ne contient aucun terme outrageant ou insultant à l’égard de l’État défendeur ou de ses institutions, ou encore de l’Union africaine ; ce qui la rend conforme à l’exigence de la règle 50(2)(c) du Règlement.

 

La Cour observe également que la Requête n’est pas fondée exclusivement sur des nouvelles diffusées par des moyens de communication de masse, mais sur des documents judiciaires émanant des juridictions internes de l’État défendeur. Elle est donc conforme à la règle 50(2)(d) du Règlement.

 

La Cour estime également que la Requête ne soulève aucune question déjà réglée par l’État défendeur conformément aux principes de la Charte des Nations Unies ou de l’Acte constitutif de l’UA, au sens de la règle 50(2)(g) du Règlement.

 

La Cour en conclut que la Requête remplit toutes les conditions énoncées à l’article 56 de la Charte, tel que repris à la règle 50(2) du Règlement, et la déclare, par conséquent, recevable.

 

 

SUR LE FOND

 

Le Requérant allègue la violation de ses droits au procès équitable notamment (A) le droit à ce que sa cause soit entendue, (B) le droit d’être jugé dans un délai raisonnable et (C) le droit à la défense.

 

Violation alléguée du droit à ce que sa cause soit entendue

 

Le Requérant soulève deux (2) griefs en ce qui concerne le droit à ce que sa cause soit entendue, à savoir que (i) la Haute Cour a admis à tort comme élément de preuve la déclaration auto-incriminante du Requérant, par rapport à laquelle il s’est rétracté, et que (ii) la Cour d’Appel a commis une erreur de droit et de fait en ne prenant pas en compte son moyen de défense selon lequel la déclaration extrajudiciaire a été extorquée.

 

L’État défendeur conteste ces deux allégations et demande que le Requérant en apporte les preuves les plus irréfutables. En ce qui concerne la première allégation, l’État défendeur soutient que, suite à l’exception soulevée par le Conseil du Requérant contre l’admission de la déclaration auto-incriminante comme élément de preuve, la Haute Cour a examiné une procédure incidente et estimé que le Requérant avait fait la déclaration de son plein gré. Sur le fondement de cette conclusion, la Haute Cour a admis la déclaration comme élément de preuve. La Cour d’appel a également confirmé la décision de la Haute Cour.

 

L’État défendeur réitère, en ce qui concerne la deuxième allégation, que le Requérant a fait sa déclaration auto-incriminante de plein gré, comme l’ont confirmé la Haute Cour et la Cour d’appel. Enfin, le Requérant n’a pas fait part à la juge de paix, qui a enregistré sa déclaration, d’un quelconque incident de torture.

***

 

L’article 7(1) de la Charte dispose : « Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue ».

 

La Cour rappelle sa jurisprudence selon laquelle, la Cour n’étant pas une juridiction d’appel, « par principe, il appartient aux juridictions nationales de se prononcer sur la valeur probante d’un élément de preuve particulier ».24 Toutefois, elle garde le pouvoir d’apprécier si, de manière générale, la façon dont le juge national a évalué ces preuves demeure en conformité avec les dispositions pertinentes des instruments internationaux des droits de l’homme applicables.25 Il convient de relever qu’au nombre des garanties du droit à un procès équitable figure le fait qu’une lourde peine d’emprisonnement prononcée à la suite d’une condamnation pour une infraction pénale soit fondée sur des preuves solides et crédibles.26 La Cour examinera successivement les deux moyens relatifs à la question de l’élément de preuve soulevée par le Requérant.

 

Sur l’admission par la Haute Cour de la déclaration auto-incriminante

 

La Cour constate qu’il résulte du dossier que l’essentiel de la défense du Requérant devant la Haute Cour et le moyen soulevé devant la Cour d’appel portait sur l’admission de la déclaration extrajudiciaire comme preuve. La Cour doit donc apprécier si l’admission de ces éléments de preuve par les juridictions nationales s’est faite conformément au droit du Requérant à ce que sa cause soit entendue, protégé par l’article 7(1) de la Charte.

 

La Cour relève qu’il ressort du dossier que, dès le début du procès, le 13 juin 2000, le Requérant a soulevé une exception d’irrecevabilité de la déclaration extrajudiciaire comme élément de preuve. La Haute Cour a donc dû examiner à titre préliminaire cette question incidente.

 

Lors de l’examen de la question incidente, le Requérant a, dans son témoignage, indiqué qu’il avait été arrêté le 20 mars 1995 et qu’il avait été ensuite battu par des « sungusungu ».27 Il a ensuite été conduit, le 23 mars 1995, devant le tribunal de district qui a ordonné sa détention provisoire. Le Requérant a indiqué qu’au lieu d’être placé en détention provisoire conformément aux ordonnances du tribunal de district, il avait été conduit à un poste de police où des agents l’ont battu et contraint à faire des aveux. Les policiers l’ont ensuite emmené devant le juge de paix le 24 mars 1995, où il a avoué avoir commis le crime. Le Requérant affirme avoir consenti à faire des aveux estimant que, ce faisant, il serait retiré de la garde à vue et placé en détention provisoire dans un établissement pénitentiaire.

 

La juge de paix (PW1) a, dans son témoignage au cours de l’examen de la procédure incidente, également indiqué qu’avant d’enregistrer la déclaration, elle s’est assurée que le Requérant avait avoué le crime de son plein gré et a, en sus, entrepris les actions suivantes : elle a procédé à un examen physique du Requérant afin de détecter d’éventuelles blessures ou contusions récentes, adressé une mise en garde au Requérant selon laquelle sa déclaration pourrait être utilisée contre lui au tribunal et s’est exprimée en kiswahili, langue comprise par le Requérant. La déclaration extrajudiciaire a, en conséquence, été enregistrée comme preuve lors du procès devant la Haute Cour.

 

La Cour observe que la Haute Cour s’est également penchée sur la question de savoir si le Requérant avait signé les aveux. Une fois de plus, la Haute Cour a été convaincue du témoignage de la juge de paix (PW1), selon lequel le Requérant a signé la déclaration en sa présence après qu’elle lui en a donné lecture. En outre, en abordant l’anomalie tenant du maintien du Requérant en garde à vue plutôt que de le conduire en prison, la Cour note qu’à l’issue de la procédure incidente, la Haute Cour a conclu que : « Les autres anomalies, à savoir le fait de ne pas conduire l’accusé en prison, n’a aucun rapport avec la question du caractère volontaire. Ces faits sont trop éloignés ». En conséquence, la déclaration auto-incriminante a été produite comme élément de preuve lors du procès devant la Haute Cour.

 

À la suite de l’admission de la déclaration auto-incriminante comme élément de preuve, la Haute Cour a poursuivi la procédure initiale devant elle. La Cour note que la Haute Cour a rejeté les dépositions orales de deux témoins à charge (PW2 et PW3) en raison des incohérences dans leurs témoignages. Par conséquent, sur les trois (3) témoins à charge, la Haute Cour ne s’est appuyée que sur un (1), (PW1), la juge de paix, qui a corroboré le caractère volontaire de la déclaration extrajudiciaire du Requérant.

 

En outre, la Haute Cour s’est appuyée sur des preuves documentaires, notamment, le rapport post-mortem des deux (2) victimes de l’événement et le rapport d’examen médical du Requérant du 22 mars 1995, indiquant qu’il ne présentait aucune contusion. Ces éléments de preuves ont été versés au dossier sans objection de la part du ministère public ou du Requérant.

 

La Cour estime donc qu’il ne résulte du dossier aucun élément qui permette de soutenir l’allégation du Requérant selon laquelle l’admission par la Haute Cour de sa déclaration auto-incriminante comme élément de preuve n’était pas conforme à son droit à ce que sa cause soit entendue.

 

Sur l’allégation d’erreur de droit et de fait commise par la Cour d’appel

 

En ce qui concerne le deuxième grief soulevé par le Requérant, la Cour observe qu’il a présenté un moyen d’appel, portant sur le manquement de la Haute Cour de relever que la condamnation était fondée sur des aveux qui ont été rétractés, sans vérifier s’ils avaient été obtenus de plein gré ou non.

 

La Cour note que la Cour d’appel a affirmé que la déclaration admise comme élément de preuve par la Haute Cour était un aveu licite. En effet, elle révélait des aspects matériels du meurtre tels que les armes utilisées pour les meurtres, ce qui a été confirmé par les rapports d’autopsie des victimes, produits devant la Haute Cour. La Cour a également relevé l’existence de faits non contestés indiquant que le Requérant était sans ignorer que son arrestation était en rapport avec le meurtre des deux (2) victimes, et que le fait de s’être enfui du lieu du crime avec ses coaccusés, indique une intention de donner la mort.

 

La Cour d’appel a également cherché à savoir si les aveux du Requérant avaient été faits de plein gré. En ce qui concerne, particulièrement, l’allégation de torture, la Cour d’appel a estimé que, le Requérant n’avait, certes, pas informé le juge de paix qu’il avait été torturé pendant sa garde à vue, mais la juge de paix n’a pas constaté d’ecchymoses sur son corps pendant l’examen physique. La Cour d’appel en a conclu que la déclaration n’avait pas été obtenue sous la torture et qu’elle était véridique, comme l’a corroboré le témoignage de la juge de paix devant la Haute Cour.

 

La Cour relève, en outre, que la Cour d’appel a fait référence à sa jurisprudence, selon laquelle la prise en compte d’un aveu, non corroboré, est assujettie à des conditions strictes, à savoir que la déclaration a été faite de plein gré, qu’elle est véridique et qu’il n’existe pas d’élément de corroboration.28 La Cour d’appel a appliqué ces critères aux faits de la cause reprochés au Requérant et s’est assurée que le Requérant avait été condamné à juste titre sur la base des aveux qu’il a faits de plein gré.

 

La Cour estime donc qu’il ne résulte du dossier aucun élément indiquant que la Cour d’appel de l’État défendeur a refusé au Requérant la possibilité de contester sa condamnation et sa peine.

 

La Cour estime, en ce qui concerne les procédures devant la Haute Cour et la Cour d’appel, que le traitement par les juridictions nationales de la déclaration extrajudiciaire et de l’allégation de torture ne révèle aucune violation des normes énoncées dans la Charte.

 

La Cour en conclut que l’État défendeur n’a pas violé les droits du Requérant prévus à l’article 7(1) de la Charte.

 

Violation alléguée du droit d’être jugé dans un délai raisonnable

 

Le Requérant allègue qu’en n’inscrivant pas au rôle le recours en révision du jugement de la Cour d’appel et en ne statuant pas sur celui-ci, la Cour d’appel siégeant à Bukoba a violé son droit d’interjeter appel, protégé par l’article 7(1)(a) de la Charte, correspondant « aux articles 136(a) et 107(a) 2(b) de la Constitution de Tanzanie de 1977 ». Le Requérant soutient qu’une période de plus de deux (2) ans s’est écoulée depuis le 10 mars 2014, date à laquelle il a déposé sa requête en révision devant la Cour d’appel, et qu’elle était toujours pendante le 8 juin 2016, date à laquelle il a saisi la Cour de céans.

 

L’État défendeur soutient que l’allégation n’est pas fondée, pour trois (3) motifs. Premièrement, l’avis de requête en révision de la décision de la Cour d’appel a été déposé hors délai, en violation de la règle 66(3) du Règlement de la Cour d’appel de Tanzanie. Deuxièmement, le Requérant n’a pas prouvé que la requête en révision a été signifiée à l’État défendeur. Enfin, la décision d’enrôlement des requêtes en révision dépend du calendrier et du budget du tribunal.

***

 

L’article 7(1)(d) de la Charte prévoit « le droit d’être jugé dans un délai raisonnable par une juridiction impartiale ».

 

La Cour se réfère à sa décision dans l’affaire Wilfred Onyango Nganyi et autres c. Tanzanie, dans laquelle elle a conclu « … qu’il n’existe pas de délai considéré comme raisonnable qui serve de norme dans l’examen d’une affaire. Pour déterminer si le délai est raisonnable ou non, chaque affaire doit être traitée selon ses propres circonstances ».29

 

Pour apprécier le caractère raisonnable de la durée d’une procédure interne, la Cour prend en compte le comportement du Requérant et la diligence de l’État défendeur dans le traitement de la procédure.30 La Cour a souligné que « les autorités des juridictions nationales ont le devoir de veiller à ce que tous ceux qui jouent un rôle dans un procès fassent tout ce qui est en leur pouvoir pour éviter tout retard inutile ».31

L’État défendeur a réfuté l’allégation du Requérant selon laquelle il a déposé la requête en révision dans les délais, auprès du Greffe de la Cour d’appel et que celle-ci a été signifiée à l’État défendeur.

 

Comme indiqué au paragraphe 9 du présent Arrêt, le Requérant n’a pas apporté la preuve que la Cour d’appel l’a autorisé à déposer la requête en révision hors délai. Il n’a pas non plus apporté la preuve qu’après avoir obtenu ladite autorisation, il a effectivement déposé la requête en révision auprès du Greffe de la Cour d’appel et que celle-ci a été dûment signifiée à l’État défendeur, comme l’exige le Règlement de la Cour d’appel.32

 

La Cour note que le Requérant ne lui a pas fourni d’éléments de preuve ou d’informations lui permettant d’apprécier s’il y a effectivement eu un retard dans l’enrôlement et l’examen de sa requête en révision.

 

Compte tenu de ce qui précède, la Cour rejette l’allégation du Requérant selon laquelle un retard a été accusé dans l’enrôlement et l’examen de sa requête en révision. La Cour estime donc qu’aucune violation de la Charte n’est établie à cet égard.

 

La Cour a déjà indiqué qu’elle n’applique pas le droit interne pour déterminer si l’État s’était conformé à la Charte ou à tout autre instrument relatif aux droits de l’homme qu’il a ratifié. La Cour estime donc qu’il n’est pas nécessaire d’examiner si les dispositions de la Constitution de l’État défendeur citées par le Requérant ont été violées.

 

 

 

Violation alléguée du droit à la défense

 

Le Requérant allègue que l’État défendeur a violé son droit à un défenseur de son choix, protégé par l’article 7(1)(c) de la Charte.

 

L’État défendeur n’a pas conclu sur ce point.

 

***

 

La Cour observe qu’aux termes de l’article 7(1)(c) de la Charte, « [t]oute personne a droit à ce que sa cause soit entendue. Ce droit comprend […] le droit à la défense, y compris celui de se faire assister par un défenseur de son choix ».

 

La Cour rappelle qu’elle a conclu que l’article 7(1)(c) de la Charte, lu conjointement avec l’article 14(3)(d) du PIDCP garantit à toute personne accusée d’une infraction pénale pouvant donner lieu à de lourdes peines, le droit de se voir automatiquement commettre un avocat et ce, à titre gracieux, chaque fois que l’intérêt de la justice l’exige.33 La Cour a également conclu que l’obligation de fournir une assistance judiciaire gratuite aux personnes accusées de crimes graves, passibles d’une lourde peine, s’applique tant au stade du procès qu’à celui de l’appel.34

 

Bien que le Requérant n’ait pas étayé cette affirmation, la Cour relève qu’il résulte du dossier que le Requérant était représenté par M. Katabalwa et M. Rweyemamu devant la Haute Cour, et par M. S. Kahangwa35 devant la Cour d’appel. La Cour relève également que le Requérant a bénéficié de l’assistance de ces trois (3) conseils aux frais de l’État défendeur. En outre, la Cour observe qu’aucun élément du dossier n’indique qu’une quelconque exception ait été soulevée devant les juridictions nationales quant à la question de savoir si ces conseils ont exercé leurs fonctions au détriment du droit à la défense du Requérant.36

 

La Cour en conclut que l’État défendeur n’a pas violé l’article 7(1)(c) de la Charte, en l’espèce.

 

Ayant conclu que l’État défendeur n’a pas violé les droits du Requérant. La Cour note, au demeurant que le Requérant a été condamné à la peine de mort obligatoire. En pareille occurrence, la Cour réitère les termes de sa jurisprudence constante,37 à savoir que la peine de mort obligatoire constitue une violation du droit à la vie, parmi d’autres droits énoncés dans la Charte, et qu’elle devrait donc être abrogée du code pénal de l’État défendeur.

 

 

SUR LES RÉPARATIONS

 

La Cour relève qu’aux termes de l’article 27(1) du Protocole, « [l]orsqu’elle estime qu’il y a eu violation d’un droit de l’homme ou des peuples, la Cour ordonne toutes les mesures appropriées afin de remédier à la situation, y compris le paiement d’une juste compensation ou l’octroi d’une réparation ».

 

Le Requérant demande à la Cour d’ordonner à l’État défendeur de lui verser un montant calculé sur la base du « quantum national des revenus annuels d’un citoyen », à titre de réparation du préjudice subi pendant la période de son incarcération. Il demande également à la Cour d’ordonner son acquittement en guise de réparation du préjudice subi du fait que l’État défendeur ne lui a pas fourni un défenseur de son choix.

 

L’État défendeur n’a pas conclu sur les observations du Requérant sur les réparations même après que celles-ci lui ont été communiquées le 20 août 2018, et malgré les prorogations de délai de trente (30) jours qui lui ont été accordées les 27 septembre 2018, 20 décembre 2018 et 15 février 2019.

 

En l’espèce, la Cour a établi que l’État défendeur n’a violé aucun des droits du Requérant tel qu’allégué.

 

Au vu de ce qui précède, les demandes de réparations du Requérant sont rejetées.

 

 

SUR LA DEMANDE DE MESURES PROVISOIRES

 

La Cour rappelle que le Requérant a sollicité des mesures provisoires, « compte tenu de l’extrême gravité de sa situation, étant un détenu dans le couloir de la mort ». L’État défendeur n’a pas conclu sur ce point.

 

La Cour estime que la présente décision sur le fond rend la demande de mesures provisoires sans objet. Il est, par conséquent, superfétatoire de statuer sur ladite demande.

 

 

SUR LES FRAIS DE PROCÉDURE

 

Le Requérant n’a formulé aucune demande spécifique relativement aux frais de procédure.

 

L’État défendeur demande à la Cour de mettre les frais de procédure à la charge du Requérant.

***

 

Aux termes de la règle 32(2) du Règlement, « [à] moins que la Cour n’en décide autrement, chaque partie supporte ses frais de procédure ».

 

En l’espèce, la Cour ordonne que chaque Partie supporte ses frais de procédure.

 

 

DISPOSITIF

 

Par ces motifs,

 

LA COUR,

 

Sur la compétence

 

À l’unanimité,

 

Rejette l’exception d’incompétence matérielle ;

Se déclare compétente.

 

Sur la recevabilité

 

À la majorité de sept (7) voix pour et trois (3) voix contre, les Juges Ben KIOKO, Tujilane R. CHIZUMILA et Dennis D. ADJEI, ayant émis une opinion dissidente commune,

 

Rejette les exceptions d’irrecevabilité de la Requête ;

Déclare la Requête recevable.

 

Sur le fond

 

À la majorité de six (6) voix pour et une (1) voix contre, la Juge Chafika BENSAOULA ayant émis une opinion dissidente et les Juges Ben KIOKO, Tujilane R. CHIZUMILA et Dennis D. ADJEI ayant émis une opinion dissidente commune sur la recevabilité,

 

Dit que l’État défendeur n’a pas violé le droit du Requérant à ce que sa cause soit entendue, protégé par l’article 7(1) de la Charte, en condamnant le Requérant sur la base de ses aveux ;

Dit que l’État défendeur n’a pas violé le droit du Requérant protégé par l’article 7(1) de la Charte, en ayant prétendument tardé à statuer sur la requête en révision de l’arrêt de la Cour d’appel ;

Dit que l’État défendeur n’a pas violé le droit à la défense du Requérant, protégé par l’article 7(1)(c) de la Charte, en ce qui concerne l’octroi au Requérant d’un défenseur de son choix.

 

À l’unanimité,

 

Sur les réparations

 

Rejette la demande de réparations formulée par le Requérant.

 

Sur la demande de mesures provisoires

 

Dit que la demande de mesures provisoires est sans objet.

 

Sur les frais de procédure

 

Ordonne que chaque Partie supporte ses frais de procédure.

 

 

Ont signé :

 

Blaise TCHIKAYA, Vice-président ;

 

Ben KIOKO, Juge ;

 

Rafaâ BEN ACHOUR, Juge ;

 

Suzanne MENGUE, Juge ;

 

Tujilane R. CHIZUMILA, Juge ;

 

Chafika BENSAOULA, Juge ;

 

Stella I. ANUKAM, Juge ;

 

Dumisa B. NTSEBEZA, Juge ;

 

Modibo SACKO, Juge ;

 

Dennis D. ADJEI, Juge ;

 

et Robert ENO, Greffier.

 

 

Conformément à l’article 28(7) du Protocole et à la règle 70(1) du Règlement, l’Opinion dissidente conjointe des Juges Ben KIOKO, Tujilane R. CHIZUMILA et Dennis D. ADJEI ; l’Opinion dissidente de la Juge Chafika BENSAOULA ; et l’opinion individuelle du Juge Blaise TCHIKAYA, Vice-président, sont jointes au présent arrêt.

 

 

Fait à Arusha, ce treizième jour du mois juin de l’an deux mille vingt-trois, en anglais et en français, le texte anglais faisant foi.

1 Andrew Ambrose Cheusi c. République-Unie de Tanzanie (arrêt) (26 juin 2020) 4 RJCA 219, § 38.

2 Il ressort du compte rendu des audiences devant la Haute Cour que les deux (2) coaccusés du Requérant sont décédés avant le début des procédures, mais que les dates de décès ne sont pas indiquées.

3 Les notifications aux fins de dépôt de ces documents étaient fondées sur la règle 51(1) du Règlement intérieur de la Cour, qui dispose : « La Cour peut, au cours de la procédure, et chaque fois qu’elle le juge nécessaire, demander aux parties de produire tout document pertinent et de fournir toutes explications pertinentes. La Cour prendra dûment acte de tout défaut de production de documents ou explications requis ».

4 Règle 59(1) du Règlement intérieur de la Cour du 1er septembre 2020.

5 Règle 50(2)(e) et (f) du Règlement intérieur de la Cour du 1er septembre 2020.

6 Kalebi Elisamehe c. République-Unie de Tanzanie, CAfDHP, Requête n° 028/2015, (arrêt) (26 juin 2020), § 18.

7 Ernest Francis Mtingwi c. République du Malawi (compétence) (15 mars 2013), 1 RJCA 197, § 14 ; Kennedy Ivan c. République-Unie de Tanzanie (fond) (28 septembre 2017), 2 RJCA 67, § 26 ; Nguza Viking (Babu Seya) et Johnson Nguza (Papi Kocha) c. République-Unie de Tanzanie (fond) (23 mars 2018), 2 RJCA 297, § 35.

8 Armand Guehi c. République-Unie de Tanzanie (fond et réparations) (7 décembre 2018), 2 RJCA 493, § 33 ; Werema Wangoko Werema et un autre c. République-Unie de Tanzanie (fond) (7 décembre 2018), 2 RJCA 539, § 29 et Alex Thomas c. République-Unie de Tanzanie (fond) (20 novembre 2015), 1 RJCA 482, § 130.

9 Mohamed Abubakari c. République-Unie de Tanzanie (fond) (3 juin 2016), 1 RJCA 624, § 32.

10 Article 39(1) du Règlement de la Cour du 2 juin 2010.

11 Mtikila c. Tanzanie (fond), supra, § 84 ; Commission africaine des droits de l’homme et des peuples c. Kenya (fond) (26 mai 2017), 2 RJCA 9, § 65 ; Kennedy Ivan c. République-Unie de Tanzanie (fond et réparations) (28 mars 2019), 3 RJCA 51, § 29(ii).

12 Règle 50(2)(e) du Règlement de la Cour du 1er septembre 2020.

13 Commission africaine des droits de l’homme et des peuples c. Kenya (fond), supra, §§ 93 à 94.

14 Voir Thomas c. Tanzanie (fond), supra, § 65 ; Abubakari c. Tanzanie (fond), supra, §§ 66 à 70 ; Christopher Jonas c. République-Unie de Tanzanie (fond) (28 septembre 2017) 2 RJCA 105, § 44.

15 Règle 50(2)(f) du Règlement de la Cour du 1er septembre 2020.

16 Voir, Communication 308/2005 (2008) AHRLR (CADHP 2008).

17 Lucien Ikili Rashidi c. République-Unie de Tanzanie (fond et réparations) (28 mars 2019), 3 RJCA 13, § 52 à 53.

18 Sadick Marwa c. République-Unie de Tanzanie, CAfDHP, Requête n° 005/2016, Arrêt du 2 décembre 2021, § 52.

19 Norbert Zongo et autres c. Burkina Faso (fond), supra, § 92. Voir également Thomas c. Tanzanie (fond), supra, § 73.

20 Igola Iguna c. République-Unie de Tanzanie, CAfDHP, Requête n° 020/2017, Arrêt du 1er décembre 2022, §§ 37 et 38.

21 Thomas c. Tanzanie (fond), supra, § 73 ; Jonas c. Tanzanie (fond), supra, § 54 ; Amir Ramadhani c. République-Unie de Tanzanie (fond) (11 mai 2018) 2 RJCA 356, § 83.

22 Ramadhani c. Tanzanie, ibid., § 50 ; Jonas c. Tanzanie (fond), ibid., § 54.

23 Thomas c. Tanzanie (fond), supra, § 73 ; Jonas c. Tanzanie (fond), supra, § 54 ; Ramadhani c. Tanzanie (fond), supra, § 83 ; Iguna c. Tanzanie, supra, § 39.

24 Kijiji Isiaga c. République-Unie de Tanzanie (fond) (21 mars 2018) 2 RJCA 226, § 65.

25 Abubakari c. Tanzanie (fond), supra, § 173.

26 Ibid, § 174.

27 Un groupe d’autodéfense ou une force de sécurité informelle.

28 Tuwamoi c. Ouganda [1967] EA 84 à la page 91. « Le point de droit est le suivant : la cour de céans a le droit de condamner un accusé sur la base d’un aveu rétracté si elle est convaincue, après avoir pris en compte les éléments matériels de l’affaire, qu’il ne ressort des éléments de la déclaration que la vérité et rien d’autre ».

29 Nganyi et autres c. Tanzanie (fond), supra, § 135.

30 Ibid, §§ 134 et 136.

31 Ibid, § 153.

32 Aux termes de l’article 66(3) et (4) du Règlement de la Cour d’appel, 2009 :

(3) L’avis de requête en révision doit être déposé dans un délai de soixante jours à compter de la date de l’arrêt ou de l’ordonnance dont la révision est sollicitée. Elle expose clairement les motifs de la révision.

(4) Des copies de l’avis de requête en révision sont signifiées à l’autre ou aux autres parties, selon le cas, dans un délai de quatorze jours à compter de la date de dépôt. La partie à l’initiative de l’avis doit déposer auprès de la juridiction la preuve de la signification.

33 Thomas c. Tanzanie (fond), supra, § 124.

34 Idem ; Nganyi et autres c. Tanzanie (fond), supra, § 183.

35 Nom des conseils tels qu’ils figurent dans le dossier.

36 Evodius Rutechura c. République Unie de Tanzanie, CAfDHP, Requête n° 004/2016, Arrêt du 26 février 2021 (fond et réparations), § 75.

37 Ally Rajabu et autres c. République-Unie de Tanzanie (fond et réparations) (28 novembre 2019) 3 RJCA 562, §§ 104 à 114. Voir également, Amini Juma c. République-Unie de Tanzanie, CAfDHP, Requête n° 024/2016, Arrêt du 30 septembre 2021, §§ 120 à 131 ; Gozbert Henerico c. République-Unie de Tanzanie ; CAfDHP, Requête n° 056/2016, Arrêt du 10 janvier 2022, § 160.

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