Charte de l'Organisation de l'Unité africaine


African Union

Charte de l'Organisation de l'Unité africaine

  • Publié
  • Commencé
  • [Ceci est la version de ce document à 25 Mai 1963.]
Nous, Chefs d’État et de Gouvernement africains réunis à Addis-Abéba, Éthiopie;CONVAINCUS que les peuples ont le droit inaliénable de déterminer leur propre destin;CONSCIENTS du fait que la liberté, l’égalité, la justice et la dignité sont des objectifs essentiels à la réalisation des aspirations légitimes des peuples africains;SACHANT que notre devoir est de mettre les ressources naturelles et humaines de notre continent au service du progrès général de nos peuples dans tous les domaines de l’activité humaine;GUIDÉS par une commune volonté de renforcer la compréhension entre nos peuples et la coopération entre nos États, afin de répondre aux aspirations de nos populations vers la consolidation d’une fraternité et d’une solidarité intégrées au sein d’une unité plus vaste qui transcende les divergences ethniques et nationales;CONVAINCUS qu’afin de mettre cette ferme détermination au service du pro­grès humain, il importe de créer et de maintenir des conditions de paix et de sécurité;FERMEMENT résolus à sauvegarder et à consolider l’indépendance et la souveraineté durement conquises, ainsi que l’intégrité territoriale de nos États, et à combattre le néocolonialisme sous toutes ses formes;VOUÉS au progrès général de l’Afrique;PERSUADÉS que la Charte des Nations Unies et la Déclaration universelle des Droits de l’Homme, aux principes desquelles nous réaffirmons notre adhésion, offrent une base solide pour une coopération pacifique et fructueuse entre nos États;DÉSIREUX de voir tous les États africains s’unir, désormais, pour assurer le bien-être de leurs peuples;RÉSOLOUS à raffermir les liens entre nos États en créant des institutions com­munes et en les renforçant;SOMMES CONVENUS de créer:

L'Organisation de l'Unité Africaine

Article I

1.Les Hautes Parties Contractantes constituent, par la présente Charte, une Organisation dénommée Organisation de l’Unité Africaine.
2.Cette Organisation comprend les États africains continentaux, Madagascar et les autres îles voisines de l’Afrique.

Objectifs

Article II

1.Les objectifs de l’Organisation sont les suivants:
a.Renforcer l’unité et la solidarité des États africains;
b.Coordonner et intensifier leur coopération et leurs efforts pour offrir de meilleures conditions d’existence aux peuples d’Afrique;
c.Défendre leur souveraineté, leur intégrité territoriale et leür indépendance;
d.Éliminer sous toutes ses formes le colonialisme de l’Afrique;
e.Favoriser la coopération internationale, en tenant dûment compte de la Charte des Nations Unies et de la Déclaration universelle des Droits de l’Homme.
2.A ces fins, les États membres coordonneront et harmoniseront leurs politiques générales, en particulier dans les domaines suivants:
a.politique et diplomatie;
b.économie, transports et communications;
c.éducation et culture;
d.santé, hygiène et nutrition;
e.science et technique;
f.défense et sécurité.

Principes

Article III

Les États membres, pour atteindre les objectifs énoncés à l’Article II, affirment solennellement les principes suivants:
1.Égalité souveraine de tous les États membres;
2.Non-ingérence dans les affaires intérieures des États;
3.Respect de la souveraineté et de l’intégrité territoriale de chaque État et de son droit inaliénable à une existence indépendante;
4.Règlement pacifique des différends, par voie de négociations, de médiation, de conciliation ou d’arbitrage;
5.Condamnation sans réserve de l’assassinat politique ainsi que des activités subversives exercées par des États voisins, ou tous autres États;
6.Dévouement sans réserve à la cause de l’émancipation totale des territoires africains non encore indépendants;
7.Affirmation d’une politique de non-alignement à l’égard de tous les blocs.

Membres

Article IV

Tout État africain indépendant et souverain peut devenir membre de l’Organisation.

Droits et devoirs des États membres

Article V

Tous les États membres jouissent des mêmes droits et ont les mêmes devoirs.

Article VI

Les États membres s’engagent à respecter scrupuleusement les principes énoncés à l’Article III de la présente Charte.

Institutions

Article VII

L’Organisation poursuit les objectifs qu’elle s’est assignés, principalement par l’intermédiaire des institutions ci-après:
1.La Conférence des Chefs d’État et de Gouvernement;
2.Le Conseil des Ministres;
3.Le Secrétariat général;
4.La Commission de médiation, de conciliation et d’arbitrage.

La Conférence des Chefs d’État et de Gouvernement

Article VIII

La Conférence des Chefs d’État et de Gouvernement est l’organe suprême de l’Organisation; elle doit, conformément aux dispositions de la présente Charte, étudier les questions d’intérêt commun pour l’Afrique, afin de coordonner et d’harmoniser la politique générale de l’Organisation. Elle peut, en outre, procéder à la révision de la structure, des fonctions et des activités de tous les organes et de toutes les institutions spécialisées qui pourraient être créés conformément à la présente Charte.

Article IX

La Conférence est composée des Chefs d’État et de Gouvernement, ou de leurs représentants dûment accrédités, et se réunit au moins une fois l’an. Si un État le demande, et sous réserve de l’accord des deux tiers des membres, la Confé­rence se réunit en session extraordinaire.

Article X

1.Chaque État membre dispose d’une voix.
2.Toutes les décisions sont prises à la majorité des deux tiers des États membres de l’Organisation.
3.Toutefois, les décisions de procédure sont prises à la majorité simple des États membres de l’Organisation. Il en est de même pour décider si une question est de procédure ou non.
4.Le quorum est constitué par les deux tiers des États membres.

Article XI

La Conférence établit son règlement intérieur.

Le Conseil des Ministres

Article XII

1.Le Conseil des Ministres est composé de Ministres des Affaires Étrangères, ou de tous autres Ministres désignés par les Gouvernements des États membres.
2.Il se réunit au moins deux fois l’an. Lorsqu’un État en fait la demande, et sous réserve de l’accord des deux tiers des membres, le Conseil se réunit en session extraordinaire.

Article XIII

1.Le Conseil des Ministres est responsable envers la Conférence des Chefs d’État et de Gouvernement. Il est chargé de la préparation de cette Conférence.
2.Il connaît de toute question que la Conférence lui renvoie; il exécute ses décisions. Il met en œuvre la coopération interafricaine selon les directives des Chefs d’État et de Gouvernement, conformément à l’Article II, paragraphe 2, de la présente Charte.

Article XIV

1.Chaque État membre dispose d’une voix.
2.Toutes les résolutions sont prises à la majorité simple des membres du Conseil des Ministres.
3.Le quorum est constitué par les deux tiers des membres du Conseil des Ministres.

Article XV

Le Conseil des Ministres établit son règlement intérieur.

Secrétaire général

Article XVI

Un Secrétaire général administratif de l’Organisation est désigné par la Conférence des Chefs d’État et de Gouvernement. Il dirige les services du Secré­tariat.

Article XVII

La Conférence des Chefs d’État et de Gouvernement désigne un ou plusieurs Secrétaires généraux adjoints.

Article XVIII

Les fonctions et conditions d’emploi du Secrétaire général administratif, des Secrétaires généraux adjoints et des autres membres du Secrétariat, sont régies par les dispositions de la présente Charte et par le règlement intérieur approuvé par la Conférence des Chefs d’État et de Gouvernement.
1.Dans l’accomplissement de leurs devoirs, le Secrétaire général adminis­tratif et le personnel ne solliciteront ni n’accepteront d’instructions d’aucun gouvernement ni d’aucune autorité extérieure à l’Organisation. Ils s’abs­tiendront de tout acte incompatible avec leur situation de fonctionnaires internationaux et ne sont responsables qu’envers l’Organisation.
2.Chaque Membre de l’Organisation s’engage à respecter le caractère exclusivement international des fonctions du Secrétaire général adminis­tratif et du personnel, et à ne pas chercher à les influencer dans l’exécution de leur tâche.

Commission de médiation, de conciliation et d’arbitrage

Article XIX

Les États membres s’engagent à régler leurs différends par des voies pacifi­ques. A cette fin, ils créent une Commission de médiation, de conciliation et d’arbitrage, dont la composition et les conditions de-fonctionnement sont définies par un protocole distinct, approuvé par la Conférence des Chefs d’État et de Gouvernement. Ce protocole est considéré comme faisant partie intégrante de la présente Charte.

Commissions spécialisées

Article XX

Sont créées, outre les commissions spécialisées que la Conférence peut juger nécessaires, les commissions suivantes:
1.La Commission économique et sociale;
2.La Commission de l’éducation et de la culture;
3.La Commission de la santé, de l’hygiène et de la nutrition;
4.La Commission de la défense;
5.La Commission scientifique, technique et de la recherche.

Article XXI

Chacune de ces commissions spécialisées est composée des Ministres compé­tents, ou de tous autres Ministres ou plénipotentiaires, désignés à cet effet par leur gouvernement.

Article XXII

Chaque commission spécialisée exerce ses fonctions conformément aux dispositions de la présente Charte, et d’un règlement intérieur approuvé par le Conseil des Ministres.

Budget

Article XXIII

Le budget de l’Organisation, préparé par le Secrétaire général administratif, est approuvé par le Conseil des Ministres. Il est alimenté par les contributions des États membres, conformément aux références qui ont permis l’établissement du barème des contributions aux Nations Unies. Toutefois, la contribution d’un État membre ne pourra pas excéder vingt pour cent du budget ordinaire annuel de l’Organisation. Les États membres s’engagent à payer régulièrement leurs contributions respectives.

Signature et ratification de la Charte

Article XXIV

1.La présente Charte est ouverte à la signature de tous les États africains, indépendants et souverains. Elle est ratifiée par les États signataires conformément à leur procédure constitutionnelle.
2.L’instrument original, rédigé, si possible, dans des langues africaines, ainsi qu’en français et en anglais, tous les textes faisant également foi, est déposé auprès du Gouvernement de l’Éthiopie qui transmet des copies certifiées de ce document à tous les États africains indépendants et souverains.
3.Les instruments de ratification sont déposés auprès du Gouvernement de l’Éthiopie, qui notifie le dépôt à tous les États signataires.

Entrée en vigueur

Article XXV

La présente Charte entre en vigueur dès réception par le Gouvernement de l’Éthiopie des instruments de ratification des deux tiers des États signataires.

Enregistrement de la Charte

Article XXVI

La présente Charte, dûment ratifiée, sera enregistrée au Secrétariat des Nations Unies, par les soins du Gouvernement de l’Éthiopie, conformément à l’article 102 de la Charte des Nations Unies.

Interprétation de la Charte

Article XXVII

Toute décision relative à l’interprétation de la présente Charte devra être acquise à la majorité des deux tiers des Chefs d’État et de Gouvernement des membres de l’Organisation.

Adhésion et admission

Article XXVIII

1.Tout État africain indépendant et souverain peut, en tout temps, notifier au Secrétaire général administratif, son intention d’adhérer à la présente Charte.
2.Le Secrétaire général administratif, saisi de cette notification, en commu­nique copie à tous les membres. L’admission est décidée à la majorité simple des États membres. La décision de chaque État membre est transmise au Secrétaire général administratif qui communique la décision à l’État intéressé, après avoir reçu le nombre de voix requis.

Dispositions diverses

Article XXIX

Les langues de travail de l’Organisation, et de toutes ses institutions, sont, si possible, des langues africaines, ainsi que le français et l’anglais.

Article XXX

Le Secrétaire général administratif peut accepter, au nom de l’Organisation, tous dons, donations ou legs faits à l’Organisation, sous réserve de l’approbation du Conseil des Ministres.

Article XXXI

Le Conseil des Ministres décide des privilèges et immunités à accorder au personnel du Secrétariat dans les territoires respectifs des États membres.

Renonciation à la qualité de membre

Article XXXII

Tout État qui désire se retirer de l’Organisation en fait notification au Secrétaire général administratif. Une année après ladite notification, si elle n’est pas retirée, la Charte cesse de s’appliquer à cet État, qui, de ce fait, n’appartient plus à l’Organisation.

Amendement et révision

Article XXXIII

La présente Charte peut être amendée ou revisée si un État membre envoie à cet effet une demande écrite au Secrétaire général administratif. La Conférence n’est saisie du projet d’amendement que lorsque tous les États membres en ont été dûment avisés, et après un délai d’un an. L’amendement ne prend effet que lorsqu’il est approuvé par les deux tiers au moins des États membres.
EN FOI DE QUOI, Nous, Chefs d’État et de Gouvernement africains, avons signé la présente Charte.FAIT à Addis-Abéba, Éthiopie, le 25 Mai 1963
▲ To the top