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UNIÃO AFRICANA | ||
AFRICAN COURT ON HUMAN AND PEOPLES’ RIGHTS COUR AFRICAINE DES DROITS DE L’HOMME ET DES PEUPLES |
AFFAIRE
ISSIAKA KEÏTA ET AUTRES
C.
RÉPUBLIQUE DU MALI
REQUÊTE N°005/2019
ARRÊT
05 septembre 2023
Sommaire
III. RÉSUMÉ DE LA PROCÉDURE DEVANT LA COUR 3
A. Sur la violation alléguée du droit à ce que leur cause soit entendue 10
i. Sur la violation alléguée du droit de saisir les juridictions nationales 10
ii. Sur la violation alléguée du droit d’être jugé dans un délai raisonnable 14
iii. Sur la violation alléguée du droit d’être jugé par un tribunal indépendant et impartial 17
C. Sur la violation alléguée du droit à la non-discrimination 23
La Cour composée de : Imani D. ABOUD, Présidente ; Ben KIOKO, Rafaâ BEN ACHOUR, Suzanne MENGUE, Tujilane R. CHIZUMILA, Chafika BENSAOULA, Blaise TCHIKAYA, Stella I. ANUKAM, Dumisa B. NTSEBEZA, Denis D. ADJEI - Juges ; et de Robert ENO, Greffier.
Conformément à l'article 22 du Protocole relatif à la Charte africaine des droits de l'homme et des peuples portant création d'une Cour africaine des droits de l'homme et des peuples (ci-après désigné « le Protocole ») et à la règle 9(2) du Règlement intérieur de la Cour1 (ci-après désigné « le Règlement »), le Juge Modibo SACKO, Vice-président de la Cour, de nationalité malienne, s’est récusé.
En l’affaire
Issiaka KEÏTA et autres
représentés par Yacouba TRAORÉ, Secrétaire général de la Fédération Nationale des Mines et de l’Énergie
contre
RÉPUBLIQUE DU MALI
représentée par Me Issaka KEÏTA, Avocat au Barreau du Mali ;
après en avoir délibéré,
rend le présent Arrêt
LES PARTIES
Le sieur Issiaka KEÏTA et cent-vingt-quatre (124) autres (ci-après dénommés « les Requérants ») sont d’anciens travailleurs de la société Bays Water Constructing and Mining (ci-après désignée « BCM »). Ils allèguent la violation de leurs droits consécutivement à leur licenciement.
La Requête est dirigée contre la République du Mali (ci-après dénommée « l’État défendeur »), devenue partie à la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples (ci-après désignée « la Charte ») le 21 octobre 1986 et au Protocole le 20 juin 2000. L’État défendeur a déposé, le 19 février 2010, la Déclaration prévue par l’article 34(6) du Protocole (ci-après désignée « la Déclaration »), par laquelle il accepte la compétence de la Cour pour recevoir des requêtes émanant des individus et des organisations non gouvernementales dotées du statut d’observateur auprès de la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples.
OBJET DE LA REQUÊTE
Faits de la cause
Les Requérants font valoir que, le 04 juillet 2012, ils ont conclu avec la BCM et en présence du directeur régional du travail de Kayes, un procès-verbal d’accord portant sur neuf (9) points2. Ils ajoutent que, du fait du refus de la BCM d’exécuter ce procès-verbal, ils ont observé une grève à la suite de laquelle ils ont été licenciés le 15 août 2012.
Ils affirment en outre qu’ils ont contesté, en vain, leur licenciement aussi bien devant l’inspection régionales du travail de Kayes que devant différentes juridictions nationales, y compris, la Cour Suprême de l’État défendeur.
Violations alléguées
Les Requérants allèguent la violation des droits suivants :
Le droit à la non-discrimination, protégé par l’article 2 de la Charte ;
Le droit à une totale égalité devant la loi et le droit à une égale protection de la loi, protégés par l’article 3 de la Charte ;
Le droit à ce qui leur cause soit entendue, en particulier,
Le droit de saisir les juridictions nationales compétentes de tout acte violant leurs droits fondamentaux qui leur sont reconnus et garantis par les conventions, les lois, les règlements et coutumes en vigueur, protégé par l’article 7(1)(a) de la Charte ;
Le droit d’être jugé dans un délai raisonnable, par une juridiction impartiale, protégé par l’article 7(1) (d) de la Charte.
Les Requérants allèguent, en outre, la violation de l’obligation d’indépendance des tribunaux prévue par l’article 26 de la Charte.
RÉSUMÉ DE LA PROCÉDURE DEVANT LA COUR
La Requête introductive d’instance a été reçue au Greffe le 21 février 2019.
Elle a été communiquée à l’État défendeur le 13 août 2019 aux fins de dépôt de sa réponse dans un délai de soixante (60) jours, à compter de la date de réception.
Le 23 août 2023, la Cour a rendu une ordonnance de modification du titre de la Requête ainsi qu’il suit : Issiaka KEÏTA et autres c. République du Mali. Ladite ordonnance a été signifiée aux Parties, le 28 août 2023.
Toutes les écritures et pièces de procédure ont été régulièrement déposées et communiquées. Le 29 août 2023, le Greffe a informé les parties de la clôture des débats.
DEMANDES DES PARTIES
Dans leur Requête introductive d’instance, les Requérants demandent à la Cour de :
Se déclarer compétente ;
Déclarer la Requête recevable ;
Condamner l’État du Mali à les mettre dans leurs droits allègrement violés.
Dans leurs conclusions en réplique, ils demandent à la Cour de :
Statuer ce que de droit sur la recevabilité de la Requête ;
Dire et juger que leurs griefs sont justifiés et fondés ;
Par conséquent,
Déclarer établies les violations des droits de l’homme et abus allégués à l’encontre de l’État défendeur
L’État défendeur demande à la Cour de :
Statuer ce que de droit sur la recevabilité du recours ;
Dire et juger que les griefs des Requérants ne sont pas fondés.
Au titre des réparations, les Requérants demandent à la Cour de :
Condamner l’État défendeur à payer la somme de vingt millions (20 000 000) de francs CFA à chaque salarié, à titre de dommages et intérêts ainsi que celle de cinq milliards (5 000 000 000) francs CFA au titre des salaires échus des mois de juillet 2012 à décembre 2018 ;
Ordonner la délivrance des certificats de travail pour chaque Requérant, sous astreinte de deux millions (2 000 000) francs CFA par jour de retard ;
Ordonner l’exécution provisoire de la décision à intervenir.
L’État défendeur conclut au rejet des demandes de réparations.
SUR LA COMPÉTENCE
La Cour note que l’article 3 du Protocole est libellé comme suit :
La Cour a compétence pour connaître de toutes les affaires et de tous les différends dont elle est saisie concernant l’interprétation et l’application de la Charte, du […] Protocole et de tout autre instrument pertinent relatif aux droits de l’homme et ratifié par les États concernés.
En cas de contestation sur le point de savoir si la Cour est compétente, la Cour décide.
Aux termes de la Règle 49 (1) du Règlement3, « la Cour procède à un examen préliminaire de sa compétence […] conformément à la Charte, au Protocole et au […] Règlement ».
Sur le fondement des dispositions précitées, la Cour doit, dans chaque requête, procéder à un examen préliminaire de sa compétence et statuer, le cas échéant, sur les exceptions d’incompétence.
L’État défendeur n’a pas soulevé d’exceptions d’incompétence.
Ayant constaté que rien dans le dossier n’indique qu’elle n’est pas compétente, la Cour conclut qu’elle a :
la compétence matérielle, dans la mesure où les Requérants allèguent la violation de droits de l’homme protégés par la Charte à laquelle l’État défendeur est partie.
la compétence personnelle, dans la mesure où l’État défendeur a déposé la Déclaration qui permet aux individus et aux organisations non gouvernementales dotées du statut d’observateur auprès de la Commission de saisir directement la Cour.
la compétence temporelle, dans la mesure où les violations alléguées ont été commises après l’entrée en vigueur du Protocole à l’égard de l’État défendeur.
la compétence territoriale, dans la mesure où les faits de la cause et les violations allégués ont eu lieu sur le territoire de l’État défendeur.
Par voie de conséquence, la Cour est compétente pour connaître de la présente Requête.
SUR LA RECEVABILITÉ
L'article 6(2) du Protocole dispose :
La Cour statue sur la recevabilité des requêtes en tenant compte des dispositions énoncées à l'article 56 de la Charte.
Conformément à la règle 50 (1) du Règlement4 :
La Cour procède à un examen de la recevabilité (…) conformément aux articles 56 de la Charte et 6(2) du Protocole et au (…) Règlement.
La règle 50(2), qui reprend en substance l'article 56 de la Charte, est libellée ainsi qu’il suit :
Les requêtes introduites devant la Cour doivent remplir les conditions ci-après :
Indiquer l'identité de leur auteur, même si celui-ci demande à la Cour de garder l’anonymat ;
Être compatibles avec l'Acte constitutif de l'Union africaine et la Charte ;
Ne pas être rédigées dans des termes outrageants ou insultants à l’égard de l’État concerné et de ses institutions ou de l’Union africaine ;
Ne pas se limiter à rassembler exclusivement des nouvelles diffusées par les moyens de communication de masse ;
Être postérieures à l’épuisement des recours internes s’ils existent, à moins qu’il ne soit manifeste à la Cour que la procédure de ces recours se prolonge de façon anormale ;
Être introduites dans un délai raisonnable courant depuis l’épuisement des recours internes ou depuis la date à laquelle la Commission a été saisie de l’affaire ;
Ne pas concerner des affaires qui ont été réglées par les États concernés, conformément aux principes de la Charte des Nations Unies, de l'Acte constitutif de l'Union africaine ou des dispositions de la Charte.
La Cour note que l’État défendeur n’a soulevé aucune exception d’irrecevabilité. La Cour est, néanmoins, tenue d’examiner si les conditions requises par les dispositions sus-visées sont remplies.
À cet égard, conformément à la règle 50(2)(a), les Requérants ont clairement indiqué leurs identités.
En outre, la Requête n’est, en rien, incompatible avec l’Acte constitutif de l’Union africaine et la Charte comme l’exige la règle 50(2)(b) dans la mesure où l’un des objectifs de l’Acte constitutif de l’Union africaine, tel qu’énoncé en son article 3(h) est la promotion et la protection des droits de l’homme et des peuples.
Par ailleurs, elle ne contient aucun terme outrageant ou insultant à l’égard de l’État défendeur, de ses institutions ou de l’Union africaine, tel que l’exige la règle 50(2)(c).
Du reste, en conformité avec la règle 50(2)(d), la Requête ne se limite pas à rassembler exclusivement des nouvelles diffusées par les moyens de communication de masse.
S’agissant de l’épuisement des recours internes, les Requérants soutiennent qu’ils se sont conformés à cette exigence en ce qu’ils ont saisi la Cour suprême de l’État défendeur qui est la plus haute instance judiciaire.
La Cour note qu’il résulte des pièces de la procédure, que des mêmes faits et griefs, les Requérants ont saisi le tribunal de première instance de Kita qui a rendu son jugement le 05 juin 2013 (ci-après désigné « jugement du tribunal de Kita »). Ce jugement a été infirmé par l’arrêt de la Cour d’Appel de Kayes du 12 décembre 2013 (ci-après désigné « arrêt de la Cour d’appel de Kayes ») qui a été frappé d’un pourvoi formé par les Requérants devant la Cour Suprême. Le 10 décembre 2014, la Cour Suprême, a cassé et annulé cet arrêt, puis renvoyé la cause et les parties devant la Cour d’appel de Bamako.
La Cour note également que le 31 août 2017, la Cour d’appel de Bamako a rendu un arrêt en faveur des Requérants. Suite à un pourvoi en cassation formé par la BCM, la Cour Suprême, statuant en chambres réunies, a cassé et annulé ledit arrêt sans renvoi, le 17 avril 2018.
La Cour constate que l’affaire des Requérants a été portée jusqu’à la Cour Suprême qui est la plus haute juridiction de l’ordre judiciaire de l’État défendeur. Les Requérants ont donc épuisé les recours internes, remplissant ainsi la condition prévue conformément à la règle 50(2)(e).
En ce qui concerne la condition relative à l’introduction de la Requête dans un délai raisonnable prévue par la règle 50(2)(f), la Cour retient, comme date faisant courir le délai de sa propre saisine, celle de la décision de la Cour Suprême, statuant en chambres réunies, c’est-à-dire, le 17 avril 2018. Entre cette date et celle de la saisine de la Cour de céans, soit le 21 février 2019, il s’est écoulé trois (10) mois et quatre (4) jours. La Cour considère que ce délai est raisonnable. En conséquence, la Cour estime que cette exigence est remplie.
Enfin, la Cour relève, conformément à la règle 50(2)(g), que rien n’indique que la présente Requête concerne une affaire déjà réglée par les parties conformément aux principes de la Charte des Nations Unies, de l’Acte constitutif de l’Union africaine ou de la Charte.
Au regard de ce qui précède, la Cour déclare la Requête recevable.
SUR LE FOND
Les Requérants allèguent la violation du droit à ce que leur cause soit entendue (A), sous plusieurs aspects, ainsi que celle de l’obligation de garantir l’indépendance des tribunaux. Ils allèguent également la violation des droits à l’égalité devant la loi et à une égale protection de la loi (B) ainsi que la violation du droit à la non-discrimination.
Sur la violation alléguée du droit à ce que leur cause soit entendue
Les Requérants allèguent la violation du droit à ce que leur cause soit entendue, en particulier, le droit de saisir les juridictions nationales de tout acte violant leurs droits fondamentaux (i), le droit d’être jugé dans un délai raisonnable (ii) par un tribunal impartial. Ils allèguent également la violation de l’obligation de garantir l’indépendance des tribunaux. Eu égard à la connexité qui existe entre l’indépendance et l’impartialité des juridictions, la Cour estime qu’il est opportun de traiter les deux dernières violations alléguées dans une même partie5 (iii).
Sur la violation alléguée du droit de saisir les juridictions nationales
Les Requérants soutiennent qu’à la suite d’une grève initiée après le refus de la BCM d’exécuter un procès-verbal d’accord du 4 juillet 2012, ils ont été licenciés, le 15 août 2012, sur autorisation du directeur régional du travail de Kayes. Ils ajoutent que cette autorisation a été annulée par la direction nationale du travail, ce qui aurait dû avoir comme conséquence leur réintégration.
Ils soulignent que, n’ayant pas été réintégrés, ils ont saisi le tribunal de première instance de Kita pour licenciement abusif et paiement de diverses sommes d’argent à titre de dommages et intérêts. Par jugement n°04 du 05 juin 2013 (ci-après désigné « jugement du tribunal de Kita »), le tribunal de première instance de Kita a jugé le licenciement irrégulier et a condamné la BCM au paiement de la somme totale de huit milliards (8 000 000 000) francs CFA.
Les Requérants précisent, en outre, que ce jugement a été infirmé suivant arrêt n°23 du 12 décembre 2013 de la Cour d’appel de Kayes (ci-après désigné « arrêt de la Cour d’appel de Kayes »). Saisie d’un pourvoi en cassation contre ledit arrêt, la Cour Suprême a, par arrêt n°32 du 10 décembre 2014 (ci-après désigné « Premier arrêt de la Cour Suprême »), cassé l’arrêt et renvoyé la cause et les parties devant la Cour d’appel de Bamako.
Ils font valoir qu’alors que l’affaire était pendante devant cette juridiction, la BCM a introduit un rabat d’arrêt contre le premier arrêt de la Cour Suprême. Ce recours a été rejeté, le 27 juin 2016, ce qui a permis à la Cour d’appel de Bamako de poursuivre l’examen de l’affaire.
Les Requérants relèvent, par ailleurs, que suivant arrêt n°100 du 31 août 2017 (ci-après désigné « arrêt de la Cour d’Appel de Bamako »), ladite Cour a alloué à chacun des travailleurs la somme de vingt millions (20 000 000) francs CFA à titre de dommages et intérêts.
Ils font remarquer qu’en exécution de cet arrêt de la Cour d’appel de Bamako du 31 août 2017, ils ont initié une procédure d’exequatur devant les juridictions ivoiriennes, puisque leur ex-employeur s’était installé en Côte d’Ivoire.
Ils soutiennent, par ailleurs, que contre toute attente, l’arrêt du 31 août 2017 a été cassé par la Cour Suprême, statuant en chambres réunies, le 17 avril 2018 (ci-après désigné « deuxième arrêt de la Cour Suprême ») et qu’ils ont initié une procédure de rabat d’arrêt.
L’État défendeur conclut au débouté puisque, selon lui, les Requérants n’apportent pas la preuve de leurs allégations. Il fait valoir que son système judiciaire a permis aux Requérants de saisir les juridictions nationales compétentes en vue du respect et de la reconnaissance de leurs droits. Il soutient, en outre, que les lois maliennes qui sont conformes à la Charte et au PIDCP ont permis aux Requérants de choisir des avocats pour leur défense et d’exercer toutes les voies de recours possibles.
Il souligne, à cet effet, qu’il a fait adopter et promulguer la loi no 92-020 du 23 septembre 1992 portant code du travail, modifiée par la loi no 2017-021 du 12 juin 2017 qui régit les relations entre travailleurs et employeurs, crée des tribunaux chargés de connaître des contentieux relatifs aux contrats de travail. Selon l’État défendeur, cette loi offre, entre autres garanties, une bonne administration de la justice.
***
La Cour note que l’article 7(1) (a) de la Charte dispose :
Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue.
Ce droit comprend le droit de saisir les juridictions nationales compétentes de tout acte violant ses droits fondamentaux qui lui sont reconnus et garantis par les conventions, les lois, règlements et coutumes en vigueur.
La Cour relève que ce texte consacre le droit à un recours effectif qui garantit à toute personne le droit de saisir les juridictions nationales d’un grief défendable, autrement dit, de toute allégation de violation d’un droit substantiel ou procédural6, internationalement protégé7.
La Cour rappelle que pour asseoir la violation de leur droit à un recours effectif, les Requérants invoquent les différentes procédures nationales sans indiquer, avec précision, les faits qui seraient constitutifs d’une telle violation. Leurs affirmations sont, en effet, vagues et générales. Tout-au-plus, ont-ils décrit les différentes procédures qu’ils ont initiées devant les juridictions nationales.
La Cour constate que les Requérants n’ont pas démontré l’existence d’un quelconque obstacle, ni factuel, ni juridique qui les aurait empêchés de saisir les juridictions nationales des griefs qu’ils invoquent. La Cour souligne qu’aucun élément du dossier ne révèle l’existence d’un tel obstacle, ce qui, du reste, est corroborée par le fait que les Requérants ont effectivement saisi les juridictions nationales compétentes de leurs griefs.
En tout état de cause, le simple fait qu’ils n’aient pas obtenu gain de cause ne saurait suffire pour établir la violation alléguée.
Au regard de ce qui précède, la Cour considère que l’État défendeur n’a pas violé le droit des Requérants à un recours effectif, protégé par l’article 7(1)(a) de la Charte.
Sur la violation alléguée du droit d’être jugé dans un délai raisonnable
Les Requérants font valoir que leur droit d’être jugé dans un délai raisonnable a été violé en ce que leur procédure en réclamation de dommages et intérêts dirigée contre leur ex-employeur a été anormalement longue. Ils soutiennent, à cet effet, qu’il s’est écoulé un délai de sept (7) ans entre l’assignation du 6 novembre 2011 dont le tribunal de première instance de Kita a été saisi et le deuxième arrêt de la Cour Suprême.
Ils précisent, en outre, qu’entre la date du premier arrêt de la Cour Suprême, soit le 10 décembre 2014, et celle de l’arrêt de la Cour d’appel de Bamako, soit le 31 août 2017, il s’est écoulé plus de deux (2) ans. Ils soulignent que devant la Cour d’appel de Bamako, le délibéré a été rabattu pour production, par leur ex-employeur du jugement d’instance et pour dépôt des conclusions d’instance et d’appel par les deux parties. Les Requérants ajoutent qu’en dépit du fait que les parties ont produit ces différents éléments, le délibéré a été prorogé à plusieurs reprises, de sorte que l’affaire n’a été vidée que six (6) mois plus tard.
Enfin, les Requérants font valoir qu’au moment de l’introduction de la présente affaire, la procédure de rabat d’arrêt contre le deuxième arrêt de la Cour Suprême du Mali était encore pendante.
Pour sa part, l’État défendeur soutient que les Requérants n’ont pas apporté la preuve du dépassement du délai raisonnable par les juridictions nationales dans le traitement de leur procédure.
Il précise que la procédure de rabat d’arrêt soumise à la Cour Suprême du Mali est complexe en considération du nombre élevé des Requérants et de la complexité des problèmes juridiques posés.
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Aux termes de l’article 7(1)(d) de la Charte : « Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue. Ce droit comprend (…) le droit d’être jugé dans un délai raisonnable. »
La Cour souligne que le caractère raisonnable de ce délai est, en principe, apprécié en fonction de la complexité de l’affaire, du comportement du Requérant et de celui des autorités judiciaires nationales8.
La Cour rappelle que, pour les Requérants, la violation alléguée est fondée sur trois faits : d’abord, la durée de sept (7) ans pour la procédure allant de la première instance au deuxième arrêt de la Cour Suprême, ensuite, la durée de deux (2) ans entre le premier arrêt de la Cour Suprême et l’arrêt de la Cour d’appel de Bamako et enfin, le fait que le rabat d’arrêt9 devant la Cour Suprême soit pendant au moment de l’introduction de la présente Requête.
Sur le premier point, la Cour note que durant cette période de sept (7) ans que les Requérants qualifient d’anormalement longue, six (6) décisions ont été rendues : le jugement du tribunal de première instance de Kita rendu le 5 juin 2013, l’arrêt de la Cour d’appel de Kayes rendu le 12 décembre 2013, l’arrêt de cassation et de renvoi de la Cour Suprême du Mali rendu le 10 décembre 2014, l’arrêt de la Cour Suprême du Mali rendu le 27 juin 2016 sur demande de rabat de la société BCM , l’arrêt de la Cour d’appel de Bamako suite au renvoi de la du 31 août 2017, l’arrêt de la Cour Suprême rendu en chambres réunies le 17 avril 2018.
La Cour souligne que ces procédures qui ont commencé par la saisine du tribunal de première instance de Kita, concernaient deux cent soixante-dix-neuf (279) personnes demanderesses. Elles avaient pour objet de déterminer si leur licenciement à la suite d’une grève était régulier et l’examen des demandes subséquentes. Il s’y ajoute que dès la première instance, plusieurs demandes incidentes, à savoir des exceptions de procédure ont été soulevées. Ces deux éléments attestent de la complexité de la procédure devant les juridictions nationales.
Par ailleurs, les Requérants n’ont pas démontré qu’il y a eu une lenteur imputable à leur ex-employeur ou aux autorités judiciaires au cours des différentes procédures nationales.
Sur le deuxième point, à savoir, la période de deux (2) ans qui s’est écoulée entre l’arrêt de renvoi de la Cour Suprême et celui de la Cour d’appel de Bamako, la Cour note que la partie adverse, à savoir l’ex-employeur avait introduit une requête en rabat d’arrêt de l’arrêt de la Cour Suprême. C’est sur cette base que la Cour d’appel a ordonné le sursis à statuer, sur demande de la société BCM. La Cour Suprême a rendu sa décision sur le rabat d’arrêt le 27 juin 2016. La Cour estime que l’existence de cette procédure qui a justifié que le sursis à statuer ait été ordonné a donc eu un impact sur la durée de la procédure devant la Cour d’appel de Bamako.
Troisièmement, en ce qui concerne la procédure de rabat d’arrêt qui était pendante au moment de l’introduction de la présente Requête, la Cour note que l’arrêt contre lequel il a été formé, à savoir le deuxième arrêt de la Cour Suprême, a été rendu le 17 avril 2018.
La Cour note également que le rabat d’arrêt a été introduit le 11 mai 2018, soit, 24 jours après l’arrêt qu’il visait. En outre, les Requérants ont payé la consignation exigée et déposé leur mémoire le 6 août 2018, soit deux (2) mois et vingt-six (26) jours après avoir introduit leur recours. La Cour souligne que le fait que les Requérants n’aient procédé à ces formalités que deux (2) mois après l’introduction de leur demande de rabat d’arrêt a pu influer sur la durée de la procédure.
La Cour note qu’en pareille occurrence, le délai dans lequel la cause des Requérants a été jugée est raisonnable.
En conséquence, la Cour considère que l’État défendeur n’a pas violé le droit des Requérants d’être jugés dans un délai raisonnable, protégé par l’article 7(1)(d) de la Charte.
Sur la violation alléguée du droit d’être jugé par un tribunal indépendant et impartial
Les Requérants soutiennent qu’au regard du déroulement des procédures devant les juridictions nationales, l’État défendeur a manqué à son obligation de garantir l’indépendance des tribunaux et que leur droit d’être jugés par un tribunal impartial a été violé.
Les Requérants ajoutent que c’est à leur insu que l’arrêt de la Cour d’appel de Kayes a été cassé et annulé, sans renvoi, par la Cour Suprême, suivant arrêt n°17 du 17 août 2018 et ce, sans aucune base légale, ni motivation.
Pour sa part, l’État défendeur conclut au débouté. Il soulève les mêmes arguments que ceux invoqués en ce qui concerne la violation alléguée du droit des Requérants de saisir les juridictions nationales.
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La Cour note que l’article 26 de la Charte dispose :
Les États parties à la présente Charte ont le devoir de garantir l’indépendance des tribunaux et de permettre l’établissement et le perfectionnement d’institutions nationales appropriées chargées de la promotion et de la protection des droits et libertés garantis par la (…) Charte.
Par ailleurs, aux termes de l’article 7(1)(d) de la Charte :
Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue. Ce droit comprend le droit d’être jugé (…) par une juridiction impartiale.
La Cour souligne que ces deux textes consacrent l’obligation de garantir l’indépendance des tribunaux et le droit d’être jugé par un tribunal impartial. La Cour va examiner successivement ces deux aspects, précision étant faite qu’en l’espèce, les allégations des Requérants concernent toutes les juridictions ayant eu à connaître de leur procédure, à savoir, le tribunal de Kita, la Cour d’appel de Kayes, la Cour d’appel de Bamako et la Cour Suprême.
Sur l’allégation relative à l’indépendance des juridictions ayant connu de l’affaire des Requérants
La Cour note, conformément à sa jurisprudence, que :
La notion d’indépendance judiciaire implique essentiellement la capacité des juridictions de s’acquitter de leurs fonctions, sans ingérence extérieure et sans dépendre d’aucune autre autorité10. Elle revêt deux aspects principaux : institutionnel et individuel. Alors que l’indépendance institutionnelle implique le statut et les relations avec les pouvoirs exécutif et législatif, l’indépendance individuelle se rapporte à l’indépendance personnelle des juges et à leur capacité de s’acquitter de leurs fonctions sans crainte de représailles11.
La Cour note que les Requérants fondent leur allégation sur deux moyens : d’une part, sur le déroulement de leur procédure devant les juridictions nationales et d’autre part, sur le fait que le deuxième arrêt de la Cour Suprême ait été rendu à leur insu et sans aucune base légale, ni motivation.
Sur le premier moyen, la Cour souligne qu’il est vague et imprécis. Les Requérants n’ont, en effet, aucun argument précis qui pourrait permettre d’examiner la violation alléguée.
Sur le deuxième moyen, la Cour note qu’il ne résulte d’aucune des mentions du deuxième arrêt de la Cour Suprême qu’il a été rendu à leur insu comme l’affirment les Requérants. Plus décisivement, il ressort dudit arrêt que les juges de la Cour Suprême ont examiné les deux moyens invoqués par la demanderesse au pourvoi ainsi que le mémoire en défense produit par les Requérants. Sur chaque moyen, la Cour Suprême a motivé son arrêt avant de casser et d’annuler l’arrêt de la Cour d’appel de Bamako.
La Cour estime, en somme, que les arguments des Requérants ne sont étayés par aucun élément du dossier. Ils ne remettent pas en cause ni l’indépendance institutionnelle de la Cour Suprême de l’État défendeur, ni l’indépendance individuelle des juges qui la composent.
En conséquence, la Cour déboute les Requérants et considère que l’État défendeur n’a pas violé son obligation de garantir l’indépendance de la Cour Suprême.
Sur l’allégation relative à l’impartialité des juridictions ayant connu de l’affaire des Requérants
La Cour note que tel que définie par le dictionnaire de droit international public, l’impartialité est l’« absence de parti pris, de préjugé et de conflit d’intérêt chez un juge (…) par rapport aux parties se présentant devant lui »12.
La Cour précise, conformément à sa jurisprudence, que l’impartialité d’un juge est présumée et que des preuves incontestables sont nécessaires pour réfuter cette présomption13.
La Cour note que les Requérants allèguent les mêmes arguments à la fois pour l’allégation de violation de garantir l’indépendance des tribunaux et celle du droit d’être jugé par un tribunal impartial.
La Cour souligne que l’impartialité des juges étant présumée, le Requérant n’a produit aucune preuve irréfutable de nature à la remettre en cause. En effet, leur premier moyen n’est étayé par aucun élément du dossier tandis que le deuxième est vague. Dès lors, la Cour estime que l’allégation des Requérants est mal fondée.
En conséquence, la Cour considère que l’État défendeur n’a pas violé le droit des Requérants d’être jugés par une juridiction impartiale.
Sur la violation alléguée des droits à une totale égalité devant la loi et à une égale protection de la loi
Les Requérants soutiennent que leurs droits à une totale égalité devant la loi et à une égale protection de la loi ont été violés. A l’appui, ils font valoir que dans son deuxième arrêt, la Cour Suprême a fait une mauvaise application de la loi en se fondant exclusivement sur l’avis de l’inspecteur du travail.
En réponse, l’État défendeur fait remarquer que les Requérants n’apportent pas la preuve de leurs allégations. Il souligne que leur cause a été examinée par les juridictions compétentes. Il réitère, à cet effet, son argument selon lequel son code du travail offre la garantie d’une bonne administration de la justice.
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La Cour note que l’article 3 de la Charte dispose :
1. Toutes les personnes bénéficient d’une totale égalité devant la loi.
2. Toutes les personnes ont droit à une égale protection de la loi.
Ce texte consacre les droits à l’égalité devant la loi et à une égale protection de la loi, indissociables, du reste, du droit à la non-discrimination.
La Cour souligne que le droit à une totale égalité devant la loi signifie que « tous sont égaux devant les tribunaux et les Cours de justice »14, autrement dit, les autorités chargées d’exécuter ou d’appliquer les lois doivent le faire sans discrimination, selon les situations en cause.
Quant au droit à une égale protection de la loi, il signifie que
La loi doit interdire toute discrimination et garantir à toutes les personnes une protection égale et efficace contre toute discrimination, notamment de race, de couleur, de sexe, de la langue de religion, d’opinion politique ou de toute autre opinion, d’origine nationale ou sociale, de fortune, de naissance ou de toute autre situation15.
La Cour rappelle également que, conformément à sa jurisprudence, les droits à l’égalité devant la loi et à l’égale protection de la loi ne signifient pas que toutes les affaires doivent être nécessairement traitées par les juridictions de la même manière, le traitement de chaque affaire pouvant dépendre des circonstances particulières de chacune d’entre elles16.
La Cour rappelle que les Requérants fondent leurs allégations sur la mauvaise application de la loi par la Cour Suprême.
La Cour souligne que les Requérants n’ont pas démontré qu’ils ont été victimes d’un traitement inégalitaire devant la loi ou d’une inégale protection de la loi par rapport à d’autres personnes.
Au regard de ce qui précède, la Cour rejette l’allégation des Requérants comme mal fondée. En conséquence, la Cour considère que l’État défendeur n’a pas violé les droits des Requérants à une totale égalité devant la loi et à une égale protection de la loi, protégés par l’article 3 de la Charte.
Sur la violation alléguée du droit à la non-discrimination
La Cour note que sur cette violation alléguée, les parties ont soutenu les mêmes arguments que pour l’allégation de violation des droits à une totale égalité devant la loi et à une totale protection de la loi.
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La Cour note que l’article 2 de la Charte dispose :
Toute personne a droit à la jouissance des droits et libertés reconnus et garanties dans la (…) Charte sans distinction aucune, notamment de race, d’ethnie, de couleur, de sexe, de langue, de religion, d’opinion politique ou de toute autre opinion, d’origine nationale ou sociale, de fortune, de naissance ou de toute autre situation.
La Cour rappelle sa jurisprudence selon laquelle
Il existe une interconnexion entre les droits à l’égalité devant la loi et l’égale protection de la loi d’une part, et le droit à la non-discrimination, d’autre part, dans la mesure où l’ensemble de la structure juridique de l’ordre public aussi bien national qu’international repose sur ce principe qui transcende toute norme.17
La Cour souligne qu’il appartient au Requérant qui prétend avoir été victime d’un traitement discriminatoire d’en apporter la preuve et que les affirmations d’ordre général selon lesquelles un droit a été violé sont inopérantes18.
La Cour note qu’en l’espèce, les Requérants fondent leur argument sur le fait que la loi aurait été mal appliquée par la Cour Suprême. Une telle affirmation ne peut constituer la preuve d’un traitement discriminatoire.
La Cour estime, ainsi, que les Requérants n’ont pas apporté la preuve de la violation du droit à la non-discrimination.
En conséquence, la Cour considère que cette allégation n’est pas établie et en déduit que l’État défendeur n’a pas violé le droit à la non-discrimination des Requérants.
SUR LES RÉPARATIONS
Les Requérants sollicitent le paiement de la somme de vingt-millions (20 000 000) francs CFA au profit de chacun d’entre eux, à titre de dommages et intérêts, cinq milliards (5 000 000 000) au titre des salaires échus de juillet 2012 à décembre 2018. Ils sollicitent également la délivrance de leurs certificats de travail sous astreinte de deux millions (2 000 000) francs CFA par jour de retard, le tout, sous le bénéfice de l’exécution provisoire.
En réponse, l’État défendeur conclut au débouté. Il fait valoir, en effet, qu’aucune violation des droits des Requérants ne peut lui-être imputée.
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La Cour souligne qu’aux termes de l’article 27(1) du Protocole
Lorsqu’elle estime qu’il y a eu violation d’un droit de l’homme et des peuples, la Cour ordonne toutes les mesures appropriées afin de remédier à la situation, y compris le paiement d’une juste compensation ou l’octroi d’une réparation.
La Cour a constamment estimé que les réparations ne sont accordées que lorsque la responsabilité de l’État défendeur pour fait internationalement illicite est établie et que le lien de causalité est établi entre l’acte illicite et le préjudice allégué19.
La Cour souligne que la charge de la preuve du lien de causalité incombe, en principe, au Requérant qui doit fournir les éléments pouvant fonder la demande20.
La Cour souligne, du reste, qu’elle ne peut ordonner des mesures de réparations fondées sur des allégations pour lesquelles aucune violation des droits de l’homme n’a été constatée.
En pareille occurrence, la demande de réparation des Requérants n’est pas justifiée. En conséquence, la Cour les en déboute.
SUR LES FRAIS DE PROCÉDURE
Les Requérants ont sollicité que l’État défendeur soit condamné aux dépens.
Pour sa part, l’État défendeur conclut au débouté.
***
La Cour note qu’aux termes de la règle 32 (2) « À moins que la Cour n’en décide autrement, chaque partie supporte ses frais de procédure ».
La Cour estime, en l’espèce, qu’il n’y a aucune raison de s’écarter du principe posé par ce texte. En conséquence, chaque partie supporte ses frais de procédure.
DISPOSITIF
Par ces motifs,
LA COUR
À l’Unanimité
Sur la compétence
Se déclare compétente ;
Sur la recevabilité
Déclare la Requête recevable ;
Sur le fond
Dit que l’État défendeur n’a pas violé le droit des Requérants à la non-discrimination, protégé par l’article 2 de la Charte.
Dit que l’État défendeur n’a pas violé les droits des Requérants à une totale égalité devant la loi et à une égale protection de la loi, protégés par l’article 3 de la Charte ;
Dit que l’État défendeur n’a pas violé le droit des Requérants de saisir les juridictions nationales de tout acte violant leurs droits fondamentaux, protégé par l’article 7(1)(a) de la Charte ;
Dit que l’État défendeur n’a pas violé le droit des Requérants d’être jugés dans un délai raisonnable, protégé par l’article 7(1) (d) de la Charte ;
Dit que l’État défendeur n’a pas violé le droit des Requérants d’être jugés par une juridiction impartiale, protégé par l’article 7(1)(d) de la Charte ;
Dit que l’État défendeur n’a pas violé son obligation de garantir l’indépendance des tribunaux, prévue par l’article 26 de la Charte.
Sur les Réparations
Sur les réparations pécuniaires
Déboute les Requérants de leurs demandes de réparation comme non fondées.
Sur les frais de procédure
Ordonne que chaque partie supporte ses frais de procédure.
Ont signé :
Imani D. ABOUD, Présidente ;
Ben KIOKO, Juge ;
Rafaâ BEN ACHOUR, Juge ;
Suzanne MENGUE, Juge ;
Tujilane R. CHIZUMILA, Juge ;
Chafika BENSAOULA, Juge ;
Blaise TCHIKAYA, Juge ;
Stella I. ANUKAM, Juge ;
Dumisa B. NTSEBEZA, Juge ;
Et Robert ENO, Greffier.
Fait à Arusha, ce cinquième jour du mois de septembre, en français et en anglais, le texte français faisant foi.
1 Article 8(2) du Règlement intérieur de la Cour du 02 juin 2010.
2 Ces points sont les suivants : 1. Arrêt immédiat de l’ITS régularisé sur les bulletins de paie à partir de mai 2012 ; 2. Augmentation de la prime de salissure mensuelle de mille (1.000) à dix mille (10.000) francs CFA ; 3. Attribution à chaque travailleur de la prime de production ou rendement mensuelle égale à 40% du salaire de base de chacun ; 4. Attribution à chaque travailleur de la prime de dérangement mensuelle égale à 25% du salaire de base de chacun ; 5. Augmentation de la prime mensuelle de logement de trente-cinq mille (35.000) à soixante-dix mille (70.000) francs CFA pour les mariés chaque mois et de vingt-mille (20.000) à quarante-mille (40.000) francs CFA pour les célibataires ; 6. Paiement du temps travaillé après fermeture du pointage dès la reprise du travail après congé ; 7. Augmentation de la prime de lait de dix mille (10.000) à vingt-mille (20.000) francs CFA ; 8. Déblocage de l’avancement en échelon ; 9. Application d'un tableau relatif à la prime de risque.
3 Article 39(1) du Règlement intérieur du 2 juin 2010.
4 Correspond à l’article 39 du Règlement intérieur du 02 juin 2010.
5 Sébastien Germain Marie Aïkoué Ajavon c. République du Bénin, Arrêt (fond et réparations) (2020) 4 RJCA 133 § 176.
6 Voir dans ce sens, CEDH, Kudla c. Pologne, Arrêt du 26 octobre 2000, §§ 151 à 156.
7 Voir dans ce sens, CEDH, Powell et Rayner c. Royaume-Uni, Arrêt du 21 février 1990, §§ 31 à 33 ; CEDH, Kazantzis c. Chypre, décision d’irrecevabilité du 07 août 2003, communication n°972/2001, §6.6 CEDH, Faure c. Australie, constatations du 31 octobre 2005, communication n°1036/2001.
8 Wilfried Onyango Nganyi et autres c. République-Unie de Tanzanie, Arrêt (fond) (2016), 1 RJCA 526, § 136 ; Alex Thomas c. République-Unie de Tanzanie, Arrêt (fond) (2015) 1 RJCA 482, § 104. Norbert Zongo c. Burkina Faso, Arrêt (fond) (2014), 1 RJCA 226, §§ 92 à 97.
9 Aux termes de l’article 173 (c) de la loi organique 2016 – 046 du 23 septembre 2016 fixant l’organisation, les règles et le fonctionnement de la Cour Suprême et la procédure suivie devant elle dispose : « une requête en rabat d’arrêt peut être exercée lorsque l’arrêt attaqué est entaché d’une erreur non imputable à la partie intéressée et qui a affecté la solution donnée à l’affaire par la Cour »
10 Ibid. Ajavon c. Bénin, § 277.
11 Ibid. Ajavon c. Bénin, § 278.
12 Dictionnaire de droit international public, sous la direction de Jean Salmon, Bruylant, Bruxelles, 2001, p. 562.
13 Alfred Agbesi Woyome c. République du Ghana Arrêt (fond et réparations) (2019) 3 RJCA 245 § 128 ; § 82 ; Ibid. Ajavon c. Bénin, § 293.
14 Kijiji Isiaga c. République-Unie de Tanzanie, (fond) (2018) 2 RJCA 226 § 85 ; Oumar Mariko c. République du Mali (fond) (Arrêt du 24 mars 2022) § 101.
15 Ibid. Mariko c. Mali § 101.
16 Héritiers de feu Norbert Zongo et autres c. Burkina Faso, (fond) ( 2014), 1 RJCA 226, § 167.
17 Tiekoro Sangaré et autres c. République du Mali, CAfDHP, arrêt (fond) (23 juin 2022) § 55.
18 Ibid. Sangaré c. Mali § 56.
19 Ibid. Ajavon c. Bénin § 139 ; Houngue Éric Noudehouenou c. République du Bénin, (Fond et réparations) (2020) 4 RJCA 755 § 117.
20 Ibid. Mariko c. Mali, § 174 ;